Chroniques

par bertrand bolognesi

Diotima crée deux œuvres
Reinhold Friedl et Yann Robin

Les musiques / Ballet national, Marseille
- 17 mai 2009

Si sa soirée de vendredi évoquait le passé récent en se consacrant à Dutilleux, Stockhausen et Bartók [lire notre chronique du 15 mai], le festival marseillais n’en poursuit pas moins ses explorations du bel aujourd’hui à travers de nombreuses créations, dont deux quatuors à cordes donnés ici en première. Quatuors à cordes, certes, dont la nomenclature de l’un indique « et spatialisation » et celle de l’autre « avec dispositif électronique en temps réel » : autant dire que sont ici largement requises les compétences du GMEM qui s’est joint à l’État pour ces commandes.

C’est avec leur engagement de toujours que les musiciens du Quatuor Diotima donnent à entendre ces pages nouvelles, dans la noirâtre et étouffante ouate d’une salle souterraine sise dans les sous-sols de l’édifice bas et courbe conçu dans le parc Fabre par Roland Simounet, blanche architecture, s’intégrant comme naturellement dans le ciel méditerranéen, qui abrite le Ballet National de Marseille.

Avant que soit conclu l’après-midi par une exécution inspirée de l’opus auquel les quartettistes ont emprunté leur nom – Fragmente-Stille, an Diotima de Luigi Nono (1980) –, nous découvrons le Quatuor n°2 de Reinhold Friedl, exaltation méthodique du tremolo jusqu’en ses moindres ressources. Systématique, le projet s’épuise assez vite. Outre l’approche non négligeable de sonorités indicibles révélées par une spatialisation attentive, l’on n’en retient que l’extrême difficulté qu’il impose aux instrumentistes, tendus comme jamais.

Bien différente s’avère la composition de Yann Robin : Scratches, Quatuor n°1, surprend dès l’abord par l’inénarrable énergie qu’il concentre en ses moindres gestes, utilisant le dispositif technique comme autant de griffures des possibilités sonores du quatuor creusant leur brèche dans ce que peut-être l’écoute attendait. Tant mieux : bien autrement marquante se montre cette création-là, bouleversant les repères, lézardant les impacts, jusqu’à porter le plus puissamment qui soit les triturations dont elle use. Au-delà de la simple surprise qui, à elle seule, stimule l’enthousiasme, on le sait bien, Scratches transporte et interroge.

BB