Chroniques

par arvid oxenstierna

Donaueschinger Musiktage 2019 – épisode 3
créations de Mark Andre, Gordon Kampe et Nicole Lizée

SWR Experimentalstudio, Ensemble Resonanz, Bas Wiegers
Donaueschinger Musiktage / Donauhallen
- 19 octobre 2019
Bas Wiegers joue Mark Andre, Gordon Kampe et Nicole Lizée à Donaueschingen
© ralf brunner | swr

Cet après-midi, le troisième rendez-vous des Donaueschinger Musiktage associe l’ensemble Resonanz et le SWR Experimentalstudio dans trois premières mondiales, toutes commandées par la Südwestrundfunk, comme c’est l’usage dans ce festival [lire nos chroniques des concerts 1 et 2]. La compositrice canadienne Nicole Lizée est née en 1973 dans la petite cité de Gravelbourg, au sud du territoire. Pour ses créations, jouées par les grandes formations orchestrales de son pays (Orchestre symphonique de Montréal, Société de musique contemporaine du Québec et Toronto Symphony Orchestra), elle puise à toutes sortes de sources : les soundtracks des films de Kubrick et d’Hitchcock, et ces films eux-mêmes, les clips de la chaîne étasunienne MTV, la scène psychédélique des années soixante et la rave music. Durant un gros quart d’heure, Sepulchre répond sans surprise à un tel cahier des charges en révélant un talent certain dans l’art du collage et l’agencement des sonorités, au long d’une pièce très rythmée. Cette qualité dans le bricolage des timbres est particulièrement bien mise en avant par le chef néerlandais Bas Wiegers [photo], à la tête des instrumentistes hambourgeois, mais sans rien qui parvienne à convaincre, en vérité.

Joachim Haas, Thomas Hummel et Markus Radke qui conduisent le SWR Experimentalstudio collaborent ensuite à Remember me pour cordes et électronique d’un compositeur né en 1976 dans la Ruhrgebiet industrielle, l’Allemand Gordon Kampe qu’on retrouve avec plaisir [lire nos chroniques de Falsche Lieder et de Fat-finger error]. De l’ancien élève d’Adriana Hölszky à Rostock et de Nicolaus A. Huber à Essen, désormais enseignant à l’Université de Hambourg, nous apprécions une page inventive et stimulante qui témoigne d’une esthétique toute personnelle d’où transparaît un postmodernisme qui s’interroge lui-même plutôt que de développer à l’infini des factures éculées. Lui aussi nous surprend par des collages éclectiques, comme ces voix venues d’ailleurs, les résidus d’un bal populaire ou encore la célèbre chanson d’Eduardo di Capua, O sole mio. La lisibilité de la lecture de Resonanz est un atout de taille.

Ce concert d’à peine une heure est achevé par rwh 1 du Français Mark Andre, installé de longue date à Berlin. La lenteur d’installation du halo bruitiste confère à cette œuvre un climat méditatif évident. Les événements instrumentaux procèdent d’un geste minimal amplement respiré, d’une facture franchement signée [lire nos chroniques du triptyque riss, d’un-fini I, modell – hij, ...auf...II, ...22,13... et du CD …auf…]. Dans rwh 1 s’affirme un sens solide de la forme, à partir d’une répartition intrigante des sons sur une vibration omniprésente, comme une pédale d’orgue qui, au début du troisième tiers de l’œuvre, devient des accords puissants d’orgue rehaussés de cloches, sans que disparaisse le bourdonnement grave d’origine, comme un souffle immuable. À 20h, troisième moment de la journée avec le duo Maja Osojnik et Matija Schellander, pour un programme NOWJazz-Session : je m’abstiens, à demain…

AO