Chroniques

par bertrand bolognesi

Dresdner Kammerchor, Le Concert Lorrain, Christoph Prégardien
Johann Sebastian Bach | Weihnachtsoratorium BWV 248

Joanne Lunn, Margot Oitzinger, Markus Schäfer, Peter Kooij
Arsenal, Metz
- 22 décembre 2017
Andrea Mantegna, "Presentazione al tempio", 1460 © Kurt Schäff, Berlin 2009
© kurt schäff, berlin 2009 | andrea mantegna – presentazione al tempio, 1460

Deux soirs avant le réveillon, Le Concert Lorrain, orchestre baroque (sur instruments anciens) en résidence à l’Arsenal, associe la vingtaine de voix du Dresdner Kammerchor aux jeunes gosiers du Chœur du CRR Gabriel Pierné de Metz pour célébrer Noël au fil de quatre des six cantates à former le Weihnachtsoratorium BWV 248 de Johann Sebastian Bach. Ainsi la soirée commence-t-elle dans l’enthousiasme communicatif de Jauchzet, frohlocket!, la première d’entre elles, introduite dans un frémissement instrumental rapide à la tonicité rafraîchissante, sous la leste battue de Christoph Prégardien. On retrouve avec plaisir cette formation fiable, qui plus est en compagnie du baryton et chef – on les applaudissait à la Philharmonie de Paris, il y a deux ans [lire notre chronique de Passio Domini nostri J.C. secundum Evangelistam Matthaeum BWV 244].

Le quatuor de solistes réuni pour l’occasion accuse cependant un manque d’unité qui peut se révéler assez gênant. Un artiste est parfois fatigué ou encombré de quelque virus pernicieux, aussi s’attachera-t-on au réussi plutôt qu’au résiduel. On est alors heureux de pouvoir compter sur la clarté d’émission, l’impact facile et précis de Markus Schäfer, ténor rigoureusement arrimé au texte de l’Évangéliste qu’il transmet avec une évidence bénéfique. On découvre les enfants de l’institution locale dans Wie soll ich dich empfangen, premier choral du concert, fort doux, en dialogue avec la partie de basse.

La quatrième cantate, Fallt mit Danken, fallt mit Loben, conclut la première partie, les deux trompettistes de la touche ayant laissé place à deux cors. L’excellence du dire de l’Évangéliste s’y décline alors pour la première fois hors récitatif, avec l’air Ich will nur dir zu Ehren leben, introduit d’italienne manière par les cordes. Pour sa musicalité indicible dans le jeu d’écho de Flößt, mein Heiland, l’air de soprano, il faut citer l’excellente Suzanne Regel (hautbois). Après la souple prestation des choristes saxons et des enfants dans le choral Jesus richte mein Beginnen, la cinquième cantate du cycle est ouverte de façon haletante par un chœur fervent, Ehre sei dir, Gott. Pendant l’air Erleucht auch meine finstre Sinnen, la bassoniste hongroise Dóra Király fait merveille, aux côtés de Sabina Chukurova au positif. Le grand chœur d’entrée de la dernière cantate fait son effet, avec un relief presque luxueux. Félicitons la grâce savoureuse maintenue par l’orchestre dans l’air de soprano (Nur ein Wink von seinen Händen) et saluons une nouvelle fois Markus Schäfer pour son autorité dans l’air dramatique Nun mögt ihr stolzen Feinde schrecken. Grand bravo à Georg Köhler et Hylke Rozema qui se jouent aisément des difficiles parties de cor, de même qu’à Steven Bossuyt, Alain De Rudder et Jonas Van Hoeydonck, habiles trompettistes qui réalisent ornements et fioritures sans même ciller. Le Concert Lorrain ne déroge donc pas à sa bonne réputation [lire nos chroniques du 20 septembre 2014 et du 4 mai 2016].

BB