Chroniques

par gérard corneloup

Hänsel und Gretel | Hansel et Gretel
opéra d'Engelbert Humperdinck

Opéra national de Lyon
- 8 juin 2010
Hänsel und Gretel, opéra d‘Humperdinck selon Laurent Pelly, à Lyon
© bertrand stofleth

Il se maintient haut la main sur les scènes germaniques, à l'occasion des fêtes de fin d'année, mais n'a jamais réussi à s'imposer au répertoire lyrique français, même pour Noël. Et pourtant ! Ce conte musical à mi-chemin entre Perrault et Grimm (lequel inspira le livret), narrant les aventures d'un couple de gamins pauvres qui avec ruse et brio se sort des pattes d'une ignoble sorcière qui voulait proprement les dévorer, ne manque ni de charme, ni de séduction. Romantique, voire romanesque à souhait, la partition laisse voir une influence wagnérienne certaine mais jamais pesante, l'ouvrage se plaçant plus dans la tradition allemande d'un Weber, d'un Lortzing, d'un Nicolaï que dans la métaphysique longue et appuyée du grand Richard.

Dépassant le monde du seul conte de fée, Laurent Pelly, toujours inspiré, joue hardiment la carte de la contemporanéité, dans les décors très en situation de Barbara de Limburg et les éclairages de Joël Adam. Centrée sur une sorte de grand carton avachi et destroy, entouré de déchets – la misérable demeure de la famille –, la première partie évoque de poignante façon les SDF qui hantent les rues de nos villes, y compris dans le froid venu. Tout en contraste est la cabane de la sorcière, transformée en une gondole de supermarché débordante de produits aussi séduisants et attirants que trop colorés et sucrés – une sorte de bastion de gâteaux, sirops chimiques, jus de fruits synthétiques et autres, sur lequel les gamins affamés ne peuvent que se jeter, en attendant que l'hôtesse du lieu, jouée en travesti, ne s'emploie à les gaver avant de vouloir les déguster… en vain !

La distribution est d'une belle homogénéité, de l’Hänsel de Michaela Selinger à la Gretel de Julia Novikova en passant par Klaus Kuttler en Père et Irmard Vilsmaier en Mère, dominée par la forte personnalité et la vitalité vocale deWolfgang Ablinger-Sperrhacke, Sorcière acariâtre, excentrique et colérique du meilleur effet.

GC