Chroniques

par bertrand bolognesi

L'Itinéraire a trente-cinq ans

Auditorium Saint-Germain, Paris
- 1er avril 2008
affiche du concert des 35 ans de l'ensemble L'Itinéraire
© l’itinéraire

Les avant-gardes ont leurs anniversaires, elles-aussi ! Et si l’Ensemble Intercontemporain put récemment fêter ses trente ans, ce sont trente-cinq bougies que souffle aujourd’hui L’Itinéraire. Pour ce faire, la formation fondée en 1973 par Dufourt, Grisey, Levinas, Murail et Tessier invite le public à un concert dont le mérite est de ne pas complaire l’écoute dans la stérile commémoration, et, bien au contraire, de la promener dans des styles, esthétiques et générations différentes de la création musicale de ces dernières années.

Aussi ne s’étonnera-t-on pas de l’hommage rendu à Gérard Grisey à travers Périodes, en ouverture de soirée, joué sous la battue de Mark Foster. Rappelons que L’Itinéraire a créé cette œuvre à Rome en 1974. Suivent quelques-unes des fascinantes Études pour piano de Michaël Levinas (qui dirigea l’ensemble jusqu’en 2003), dans l’interprétation précise et concentrée de Fuminori Tanada. De ses jalons posés surgit alors Où vont les lunes, nouvelle pièce (donnée en création mondiale) de François Narboni – qui, sans s’apparenter vraiment aux spectraux, se dit volontiers leur compagnon de route –, conçue pour flûte solo (Sophie Dardeau), hautbois, clarinette, violon, alto, violoncelle, harpe et vibraphone.

La création de la version définitive de Palimpseste fut assurée par Marc-André Dalbavie, son auteur, à la tête des musiciens de L’Itinéraire ; c’était en février 2005, lors du festival Présences. Nous retrouvons ici la préciosité raffinée de cette partition, à laquelle succède Scène II de Roger Tessier (1986). Outre qu’il voyage entre des pièces anciennes et de plus récentes, le programme imaginé pour cet anniversaire alterne les œuvres pour ensemble et les pages chambristes. Ainsi, après le vibraphone et la clarinette de Scène II, entendons-nous l’intime Cassation de Gérard Pesson (2003) dont les délicatesses, faussement discrètes et réellement obsédantes, posent plus loin qu’il n’y pourrait paraître leurs questionnements voilés. Pour finir, dans un contraste absolu, Transmission pour basson et électronique (2002), interprété par son dédicataire et créateur Brice Martin, oppose à l’énigmatique tout-avorté-du-non-dit de Pessonle virtuose tout-jouir-du-trop-son de Franck Bedrossian.

Le temps passant pour tout le monde, rendez-vous le 31 mai, à 18h30, au Théâtre Dunois pour le menu surprise des vingt-cinq printemps de l’ensemble Aleph.

BB