Chroniques

par gérard corneloup

récital Guillaume Vincent
œuvres de Debussy, Granados, Ravel, Strasnoy et Turina

Cordes en ballade / Hôtel de ville, Viviers
- 5 juillet 2014

Pour la seizième édition de Cordes en ballade, son festival itinérant qui, chaque année, rayonne dans les paysages agrestes et vallonnés de l’Ardèche méridionale, le Quatuor Debussy a choisi pour épine dorsale (et musicale) les musiques ibéro-américaines d’hier et d’aujourd’hui, via quelques noms aussi bien restés illustres qu’encore mal connus, mais appelés à le devenir, tout cela à travers une programmation interprétée à la fois par les jeunes instrumentalistes que réunis l’habituelle académie formatrice et par des artistes invités mêlant origines, âges et répertoires.

Quasiment premier de cordée en la matière, le pianiste Guillaume Vincent (révélé aux Victoires de la Musique Classique 2014) est de ceux-là, avec un menu copieux réunissant pas moins de cinq compositeurs, et centré, comme il se doit, sur les partitions nées d’inspirations ibériques engendrées et concrétisées par les deux siècles derniers.

Claude Debussy ouvre le bal avec les pièces du Livre II des Préludes réunies sous le label La puerta del vino, dans lequel le second père de Pelléas et Mélisande entre habilement dans le monde musical hispanique qui ne lui est pas particulièrement familier. Par la force de l’imaginaire, il y fait naître, croitre et embellir un monde vivant et bigarré, mais peut-être un peu trop sage, par rapport à la vigueur authentique qui caractérise cette musique chez Albéniz. Dans le genre, son confrère Maurice Ravel réussit nettement mieux son incursion outre-Pyrénées, avec l’éblouissant Alborada del gracioso, quatrième volet des Miroirs. Tout près, les fameuses et étincelantes Danzas españolas d’Enrique Granados et les colorées Danzas gitanas Op.55 de Joaquín Turina. Composées en 2002, trois études d’Oscar Strasnoy, intitulées Exercices de latinité et jouées ici en première française, viennent compléter le parcours, donnant envie de mieux connaître la musique de ce contemporain [lire notre entretien et notre couverture intégrale de l’édition 2012 du festival Présences qui lui était alors dédiée].

Dans une température d’étuve, Guillaume Vincent défend ce répertoire avec un mélange soigneusement dosé de technique solidement conduite et assurée, de musicalité à la fois fine et colorée, de vie intense et rayonnante. Bref, une approche ardente et juvénile, qu’il conviendra sans doute de polir et de mordorer pour lui apporter une composante supplémentaire, laquelle ne demande visiblement qu’à s’exprimer plus largement.

GC