Chroniques

par gérard corneloup

récital Stéphane Degout
Fauré, Liszt, Strauss et Wolf

Festival de La Chaise-Dieu / Théâtre municipal, Le-Puy-en-Velay
- 24 août 2014
Stéphane Degout chante Fauré, Liszt, Strauss et Wolf à La Chaise-Dieu
© virginie giraud

Quittant les vastes et solennelles autant que lointaines voûtes de l’imposante abbatiale casadéenne, le Festival de La Chaise-Dieu aime de plus en plus souvent déplacer hors les murs ses concerts les plus intimes ; dans la salle à l’italienne du petit théâtre fin XIXe siècle du Puy-en-Velay, par exemple, parfaite pour écouter un récital vocal accompagné au piano. C’est justement le cas en compagnie du baryton Stéphane Degout pour un florilège de Lieder et de mélodies françaises, judicieusement construit et formant un ensemble à la fois dense et cohérent qui, avant tout, joue sur la continuité – risqué mais réussi.

Hugo Wolf ouvre le ban avec six Lieder composés en 1888 sur des poèmes d’Eduard Mörike (1804-1875), pièces volontiers ombrées allant de la douleur de l’amant renvoyé (Der Jäger) à la furie des forces démoniaques (Der Feuerreiter), écrit après une visite au poète Hölderlin sombré dans la démence, par un compositeur qui connaîtrait lui aussi la folie.

Les cinq pages de Richard Strauss, abordées ensuite, offrent plus d’apaisement, de sérénité et d’espoir, telle Die Georgine (Le dahlia) qui se veut floral. Mais la lumière se voile toutefois dans Allerseelen (Toussaint), évoquant la bien-aimée disparue. Avec Automne, puis dans les quatre volets de L’Horizon chimérique (Jean de Mirmont), son dernier recueil, Gabriel Fauré regarde lui-aussi vers l’au-delà, alors que dans les Trois sonnets composés sur des poèmes de Pétrarque, Ferenc Liszt évoque avec une finesse exquise mais dénuée de tout madrigalisme convenu, l’amour que le poète italien portait à sa Laure, volontiers idéalisée.

Tout l’art, tout le métier aussi, de Stéphane Degout est de livrer ces mondes voisins autant que subtils, sans qu’ils s’uniformisent, se chevauchent ou s’absorbent et ne sombrent finalement dans une sorte de continuité sonore homophonique. Le chant est clair, limpide, nuancé mais délicatement varié. Le timbre est lumineux, expressif, discrètement changeant. Enfin la symbiose est parfaite autant que constante avec le jeu du pianiste Michaël Guido. Clairsemé mais séduit, le public est visiblement ravi et le mélomane est heureux. Que demander de plus ?

GC