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Chroniques
Vassili Petrenko et Baïba Skride
Mahler et Szymanowski par le Philhar’
À Paris, les bons concerts symphoniques s’enchaînent en ce début de saison. Cette fois, c’est à l’Orchestre Philharmonique de Radio France (fraichement rentré de grève) de montrer ses qualités sous la direction de Vassili Petrenko. Le programme débute par le Concerto pour violon Op.35 n°1 que Karol Szymanowski composait en 1917, à la suite de sa Symphonie Op.27 n°3 (intitulée Pieśń o nocy, c’est-à-dire Chant de la nuit comme la Septième de Mahler) avec laquelle il partage le style. Renforcé pour l’occasion par des cordes de son Académie et du CNSMD de Paris, le Philhar’ montre des atouts techniques certains, tandis que Petrenko fait évoluer à loisir les masses sonores, donnant à l’ensemble une superbe ampleur. Seul bémol, alors qu’à l’époque l’auteur disait l’ouvrage « parfait pour Paris, en raison de la sonorité éblouissante » (citation du programme de salle), c’était sans compter sur l’acoustique de la Salle Pleyel qui rend les cordes brouillonnes et la polyphonie floue lorsque s’élève le volume. Cependant, la jeune soliste Baïba Skride s’intègre parfaitement dans ce tout avec un jeu souple et des timbres naturellement slaves, portés par un Stradivarius ex-Feilitzsch 1734 au timbre très clair (prêté par Gidon Kremer).
En seconde partie, le chef russe prouve son talent de grand préparateur. En introduction de la Symphonie en mi mineur n°7 de Mahler, il fait sonner le tuba, puis des trombones et trompettes chauffés à blanc, avec une précision et une richesse extrêmement rares. Tendues, les cordes participent également de la fête, dans une vision de l’Adagio nerveuse. Tout aussi excellentes, les percussions cherchent la puissance pour ajouter leur voix à l’ensemble. Après un tel niveau de perfection, la Nachtmusik I redescend d’un cran, car Vassili Petrenko, si efficace pour insuffler une tension grâce à la dynamique dans les mouvements rapides, réussit moins facilement à développer une atmosphère faussement naïve lorsqu’elle doit rester latente et secondaire. Dans les soli, les cors accusent quelques faiblesses passagères, tandis que le reste de l’orchestre garde une véritable concentration. Au milieu, le Scherzo soutient cette lecture et s’approche des références slaves souvent citées dans cette œuvre, Kirill Kondrachine et Rafael Kubelík en premier lieu. On ne reprochera qu’un léger décalage des bois au milieu du mouvement, lorsque la gestuelle pourtant fort lisible du chef prend de l’avance sur la petite harmonie. La seconde Nachtmusik appelle les mêmes infimes réserves que la précédente, même s’il faut rappeler que la prestation de ce soir demeure globalement de haut rang.
Cinquième et dernier mouvement, le Rondo (Allegro ordinario) porte ici mal son indication tant il est joué presto, sans atteindre le contresens tant l’effet créé parait viable. À toute allure, Vassili Petrenko dévore le dernier épisode sans lâcher la bride d’un orchestre sans faille, attentif à chacune de ses indications.
VG