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Chroniques
A midsummer night's dream | Le songe d’une nuit d’été
opéra de Benjamin Britten
Quel être mystérieux, car si peu documenté, que William Shakespeare, éteint il y a quatre cents ans... En ce début 2016, l'Opéra-Théâtre Metz Métropole marque le coup tout en polyvalence avec, à travers les arts de la scène, quelques-unes des grandes œuvres du bard of Avon. Or, au sortir de la première du nouveau midsummer night's dream créé pour l'occasion, force est de reconnaître, en phase avec le public messin, que voilà bien un trésor d'opéra, encore récemment enfoui [lire les terribles dernières lignes de notre chronique du 28 novembre 2015], et inépuisable, semble-t-il, à en juger par une production si réussie et si singulière.
Pour preuve de ce bon Songe, il faudrait pouvoir se représenter l'interlude de Titania endormie (fin de l'Acte I). Par une belle nuit noire mais encore éclairée, grâce au talent de Patrick Méeüs, de loupiotes dorées dansantes, et traversée d'une lumière verte, la reine des fées repose au centre de la pièce principale du décor signé Louis Désiré [lire notre chronique du 13 mars 2015] : un gigantesque et surréaliste amoncellement de chaises rouges. Tout au bord du sommeil, la musique se fait sensationnelle et le plaisir à diriger du Nord-américain David T. Heusel, très juste et sensible, paraît aussi profond et évident qu'extrasensoriel.
Offerte par le remarquable Orchestre national de Lorraine [lire nos chroniques des 7 novembre et 19 septembre 2014, ainsi que celle du 19 mai 2013], la musique de grande envergure manque certes d'airs. Cependant, elle se révèle lyrique à souhait, faite pour l'opéra, comme si elle ne serait rien sans les images nées de la mise en scène audacieuse et connaisseuse de Paul-Émile Fourny, spécialiste de l’œuvre (il l’avait déjà montée en 2008, lors de son mandat niçois) et directeur de cette maison. Tout en respectant l'histoire shakespearienne et en en soulignant quelques vers splendides, il y a là encore plus de liberté et de créativité qui évoquent, notamment, parmi tant d'idées visionnaires, le fantastique moderne – par exemple : ce furtif baiser ouvrant le III comme un très bref instant féérique issu de Big Fish, film de Tim Burton à la semblable poésie éclatante.
Au chant, le Chœur d’enfants spécialisé du CRR de Metz, dirigé par Annick Hoerner, fait de mélodieuses fées, animées et parfois drôles dans leur sobre pyjama noir. Triomphent les deux amantes Valérie Condoluci (Helena), au timbre et à l'expression excellents, et Mariana Rewerski (Hermia), comique puis fort sensuelle, voire piquante avec, au passage, une jolie touche de sa Carmen sud-américaine, tandis que se distinguent aussi, en particulier, le charismatique ténor canadien Isaiah Bell (Lysander) et le soprano ontarois Mélanie Boisvert, réussissant sa prise du rôle de Titania, grâce à son travail et son ouverture d'esprit [lire nos chroniques du 17 mars 2015 et du 25 octobre 2012]
Conquis, saluons enfin les mérites clownesques de la fine équipe des six rustics et, surtout les ténors Osvaldo Peroni, désopilant Flute, et Antoine Chenuet, Starveling, d'autant plus hilarant que discret et timide dans son jeu, ainsi que le baryton Gustavo Gibert, merveilleux et touchant Bottom.
FC