Recherche
Chroniques
Beat Furrer et Marco Stroppa
Quelques jours après l’avant-première de Fama, le quatrième ouvrage scénique de Beat Furrer [lire notre chronique du 31 mai], Agora propose d’explorer un peu plus l’univers du compositeur suisse, à travers deux rendez-vous, ce samedi, le premier consistant en un approfondissement de Mademoiselle Else d’Arthur Schnitzler et le second en un concert chambriste assuré par l’ensemble Court-Circuit. Et c’est avec deux pièces déjà anciennes que s’ouvrait ce dernier, à 17h en l’Église des Billettes : Presto con fuoco de 1998 et Aer de 1991, l’une convoquant la flûte et le piano tandis que l’autre fut écrite pour clarinette, violoncelle et piano. La programmation d’un festival n’est pas chose aisée à mettre en place : dans un cas idéal, il aurait été souhaitable que cette édition commençât par un tel concert pour enchaîner ensuite l’opéra, et non l’inverse, tant les œuvres interprétées aujourd’hui en auraient éclairé l’écoute.
Dans Presto con fuoco, l’auditeur rencontre certains jeux sur le souffle entrelacés à des gammes fantasques, agrémentés du frottement des cordes comme de l’infime percussion du placement des doigts, autant de détournements qui renvoient à une sorte de choséité du déroulement artistique. C’est une virtuosité presque invisible que demande Aer, s’exprimant dans des nuances souvent infimes, une exigence à laquelle répondent plus qu’honorablement Pierre Dutrieu (clarinette), Alexis Descharmes (violoncelle) et Jean-Marie Cottet (piano).
La suite se veut italienne, avec La coquille de l’escargot, écrit pour flûte et piano par le vénitien Mauro Lanza en 1996, puis Etwas Ruhiger im Ausdruck de Franco Donatoni (quintette de 1967). De cette dernière pièce, on gardera le souvenir d’une lecture précise, sous la direction attentive et prudente de Renaud Déjardin.
De même entendions-nous lundi soir la création française de I will not kiss your f…ing flag de Marco Stroppa, le compositeur poursuivant ses recherches en électronique de chambre avec cet opus pour trombone augmenté, générateur de trajectoires sonores imaginaires, confié à la grande maîtrise de Benny Sluchin – à qui l’on dut, il y a quelques années, la création des deux versions de From Needle’s eye (1996 et 1999)– et à la science de Serge Lemouton qui conçut avec Stroppa le système Chroma pour contrôler la transformation des sons de l’instruments. C’est à partir d’un vers d’un poème farouchement antimilitariste de Cummings (1931) que fut imaginé la métrique de l’œuvre, dans une inspiration à la fois musicale et politique.
Cette soirée à La Maroquinerie croisait les genres, puisqu’elle s’achevait dans un moment de jazz partagé avec l’Yves Robert Trio et son programme La tendresse.
BB