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Chroniques
Cabaret
spectacle de François Verret
En octobre dernier, en résidence au Centre Régional des Arts du Cirque de Basse-Normandie (CRAC), François Verret proposait au public une étape de son spectacle Cabaret, en cours d'élaboration. Loin de l'affolement économique et médiatique, il pouvait ainsi approfondir des recherches sur l'échange interdisciplinaire (danse, cirque, théâtre, etc.), et surtout recueillir les réactions du spectateur. C'est aujourd'hui aux Parisiens de découvrir, une heure durant, cette pièce pour quatre interprètes du chorégraphe et metteur en scène qui en explique le titre :
« Dans les années trente, en Allemagne, plusieurs artistes inventaient une forme singulière de cabaret politique grinçant. Ces artistes sentaient leur temps à fleur de peau car ils y étaient plongés jusqu'au cou. C'est de cette manière qu'ils réagissaient, avec la sensibilité d'un sismographe, aux événements de l'actualité. J'ai voulu renouer avec cette forme d'engagement sur scène et créer une sorte de cabaret contemporain où l'artistique et le politique sont intimement liés. […] C'était cru, avec une dimension burlesque ».
Hélas, on est loin de Max Raabe vantant avec dérision les joies du clonage ! Ici, la plupart des artistes se côtoient sans humour – est-ce drôle, cette parodie de chanson des années soixante-dix, sur fond de vinyle qui craque ? Presque toujours en anglais, Dorothea Munyaneza chante l'arrivée de la Bête et celle de vagues de peur, d'une voix fiable mais quelconque, forçant parfois la cassure. Au piano, quand elle ne cogne pas le bois ou les cordes de l'instrument, Séverine Chavrier l'accompagne avec une musique minimaliste et répétitive s'inspirant au mieux de Satie et Debussy, au pire de Keith Jarrett et Yann Tiersen.
Verret a développé son projet à partir de textes d'Heiner Müller et d'Ahmed Meguini, souvent dans la rue par le passé, comme militant altermondialiste actif. En écho à des projections mille fois vues de scènes d'actualité, le comédien balance des clichés sur le Système, la prison et la Guerre de tous contre tous. Si le jeune homme a connu le combat à Sarajevo, l'incarcération à Strasbourg et la galère de nombreux jeunes rêvant de révolution, il vaut mieux que cette caricature de lui-même.
De ce spectacle pauvre et prétentieux, qui exploite la moindre idée jusqu'à l'écœurement, il reste le souvenir des contorsionnistes Angela Laurier et Mika Kaski, lesquels parviennent seuls, avec l’émotion d’un corps de pantin démantibulé, à transmettre leur difficulté à vivre.
LB