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Chroniques
concert 11 – Quatuor Sonar
Sven Ingo Koch, Helmut Lachenmann, Jörg Mainka et Helmut Zapf
Après la catastrophe d’hier soir [lire notre chronique de la veille], entre autres désastres [lire notre « feuilleton » des concerts 1, 2, 3, 5, 6, 7 et 8], enfin nous est-il donné cet après-midi de découvrir l’excellent Quatuor Sonar, créé à Berlin il y a huit ans, et qui dès le départ s’est précisément donné pour mission de jouer la musique des compositeurs de son temps. Son concert à la maison ronde commence par la création française du Quatuor de Sven Ingo Koch – dont nous avions pris plaisir à entendre Salut to S.D. il y a quelques années [lire notre chronique du 23 juillet 2007]. C’est à explorer une ligne mélodique entravée que Koch s’est employé dans cette œuvre de 2010, « un peu à la manière du peintre Lyonel Feininger […chez qui] les lignes se croisent et créent un effet de profondeur multidimensionnelle », précise-t-il. De fait, l’inflexion tendre de l’alto voit d’emblée contrariée sa mélodie dans une sorte de saupoudrage qui la livrera par fragments. En effet, les minces cassures du peintre new yorkais – d’origine allemande, dont on connaît bien les vues de la Marktkirche d’Halle, par exemple, mais aussi ces inspirations des fugues de Bach (Gelmeroda) –, sorte de pliage du motif qu’elles restituent en quasi rayons de lumière [photo], est bien reconnaissable au long des six sections que comptent cet opus.
Quant à lui, Helmut Zapf a tourné son esprit créatif vers la littérature, de sorte que son goût pour la poésie d’Hendrik Jackson fécondait l’an dernier ses Verschwommene Ränder (Marges indécises), neuf bagatelles pour quatuors à cordes dont Sonar donne ici quatre extraits. I chante une danse frottée aux atours « ethniques », tandis que les mélopées embryonnaires de IV introduisent la virevolte de VI, d’abord sur des pizz’ fort souples puis dans cluster du tutti conclu en glissando. À l’élan lyrique du violoncelle de la bagatelle IX répondent les harmoniques sifflés de ses partenaires ; après trois reprises de cet appel, un jeu en escalier dissout l’échange.
Troisième première française de ce rendez-vous, le Quatuor n°1 de Jörg Mainka (2009) se révèle dru et bref, dansant bientôt ses ostinati avec belle humeur. Mais c’est assurément dans le fameux Gran Torso d’Helmut Lachenmann qu’on perçoit l’indiscutable qualité du Quatuor Sonar, formé par Wojciech Garbowski et Susanne Zapf aux violons, Nikolaus Schlierf à l’alto et Cosima Gerhardt au violoncelle. Il livre une interprétation d’une stupéfiante précision, par-delà ce maniérisme du compositeur qui érigeait un geste de Luigi Nono en véritable tic langagier. Ce concert sera retransmis par France Musique le 17 mars à 20h : n’hésitez pas !
BB