Chroniques

par bertrand bolognesi

Cursus 2
œuvres de Villanueva, Clift et Einbond

Agora / Le Centquatre, Paris
- 13 juin 2009

S’intégrant dans le vaste champ investi cette année par le festival Agora, les œuvres conçues à l’Ircam dans le cadre de Cursus 2 sont présentées cet après-midi dans l’auditorium tout neuf du Centquatre, dans le 19ème arrondissement. Trois premières emmènent le public vers des univers différents, voire contrastés. Si ce rendez-vous se conclut par Bach dans l’arrangement réalisé par Stokowski, ici distribué par les haut-parleurs qui accompagnent Luisance, création chorégraphique d’Alban Richard ayant vu le jour en octobre dernier, la danse occupe une large place, auparavant, dans With my Limps in the Dark de Paul Clift, pièce pour flûte basse, clarinette basse, alto, soprano enregistré, percussion, danseuse et dispositif électronique, inspirée d’un texte du russo-américain Joseph Brodsky. L’idée est d’étroitement lier le corps au traitement technologique du son, un son vraisemblablement voulu en-dehors des habitudes de l’institut et qu’on rapprochera plutôt d’une certaine couleur pop australienne d’il y a vingt-cinq ans. De fait, la danseuse – Laurie Giordano – tourne, dessinant un cercle régulier dont le mouvement se déplace peu à peu jusqu’à lui faire gagner l’avant-scène. Là, elle inverse la rotation, la relance dans une nouvelle ampleur par quelques pas contredisant le geste, pour rapidement rejoindre le haut.

Utilisant les vers du germano-américain Charles Bukowski, les Bukowski Madrigals de Fernando Villanueva convoquent un soprano, un trio à cordes et l’électronique. La surprise est de taille d’entendre soudain des cordes – les musiciens de L’Instant donné – abondamment vibrées dont le regard vers cette façon ancienne d’utiliser les instruments est à peine brouillé par le travail électronique. De même la voix – Donatienne Michel-Dansac – y est-elle sollicitée comme porteuse de mélodies non dénuées d’un certain dramatisme, une naïve expressivité.

C’est que le programme s’ouvrait par What the Blind See, nouvelle pièce d’Aaron Einbond, où la harpe, la percussion, le piano et l’alto s’adonnent à des attaques volontiers sèches, cultivant une sonorité arrêtée, que soulignent une clarinette basse à l’opulence percussive et des incises bruitistes de plus en plus prégnantes. L’écoute, subtilement stimulée, se concentre d’elle-même, conduite en cette œuvre salutairement exigeante à laquelle introduisait notre précédent Dossier du mois.

BB