Chroniques

par irma foletti

L’ammalato immaginario – La vedova ingegnosa
Le malade imaginaire – La veuve maligne

intermezzi de Leonardo Vinci et de Giuseppe Sellitti
Festival della Valle d’Itria / Masseria San Michele, Martina Franca
- 1er août 2019
Soirée intermezzi napolitains au Festival della Valle d’Itria de Martina Franca
© clarissa lapolla

Le premier intérêt de cette soirée, intitulée Opere in Masseria par le Festival della Valle d’Itria de Martina Franca, est la découverte de ce lieu exceptionnel qu’est la Masseria San Michele, un peu à l’extérieur de la ville. Dans cette ancienne grande propriété agricole aux allures de vaste hacienda espagnole et reconvertie aujourd’hui en hébergement touristique haut de gamme, l’accès au lieu du spectacle est enchanteur, par des dédales de cours reliées entre elles et des passages successifs sous des portiques. Il s’agit du cinquième et dernier lieu de représentation de ces intermezzi napolitains, ce spectacle ayant été proposé précédemment dans quatre autres masserie différentes. La double affiche réunit L’ammalato immaginario (1726) écrit par Leonardo Vinci (1690-1730) – trois intermèdes destinés à L’Ernelinda du même compositeur – et La vedova ingegnosa (1735) de Giuseppe Sellitti (1700-1777).

L’intrigue de la première pièce convoque deux protagonistes pour les rôles d’Erighetta et Don Chilone. Indisposée ce soir et n’assurant que le jeu sur scène, le soprano Lavinia Bini est remplacé, pour la partie chantée, par Maria Silecchio, placée devant un pupitre au fond de la cour. La synchronisation est parfaitement assurée, la chanteuse du soir produisant une prestation plus qu’honnête, mais elle est sans doute sujette au trac en début de représentation et son timbre est un peu pointu, les récitatifs évoquant une Despina mozartienne. On pense d’ailleurs à Così fan’ tutte lorsque celle-ci se déguise en faux-médecin pour prodiguer ses conseils au malade imaginaire. Le baryton Bruno Taddia joue merveilleusement l’hypocondriaque, un vrai malade qui tousse et éternue dans son lit, puis lorsqu’il se lève porte l’oreiller accroché derrière la tête, coiffé d’un bonnet de nuit. Le baryton est bien dans la tradition bouffe napolitaine, dans la lignée d’un Alessandro Corbelli, mais sans les moyens vocaux de son aîné, le registre grave sonnant très inconfortablement, avec les notes les plus basses plutôt éteintes [lire nos chroniques de La Calisto, Punch and Judy, Il barbiere di Siviglia et Don Pasquale].

La mise en scène de Davide Gasparro est vivante et pleine de mouvement, placée sur et autour d’un petit théâtre de tréteaux, structure légère qui permet l’itinérance du spectacle. L’horaire de la représentation est particulièrement tardif, soit 22h30 qui se transforme en à peu près 23h00 après un retard au démarrage, puis l’orchestre qui s’accorde pendant un temps qui paraît démesuré. Surtout que La Cappella Musicale Santa Teresa dei Maschi n’est pas toujours précise dans son intonation, en particulier à chaque entame de partie... justement après s’être accordée longuement et scrupuleusement ! Les musiciens (cordes uniquement) sont placés sous la direction du chef et claveciniste Sabino Manzo.

Le second intermezzo napolitain est La vedova ingegnosa de Giuseppe Sellitti, destiné à placer une pause bouffe dans le drame Demofoonte de Leonardo Leo (1694-1744) sur un texte de Métastase. Cette page plus courte passe bien mieux dans l’auditoire, les deux solistes assurant, cette fois, les rôles de la veuve Drusilla et du docteur Strabone. Dans les deux intrigues, c’est la femme qui arrive à ses fins en épousant l’homme en vue, aux moyens financiers certains. Dans cet opus, Drusilla se travestit en soldat qui provoque à l’épée le docteur Strabone, le duel se transformant ici en combat de boxe. Le soldat fait jurer au docteur d’épouser la veuve, puis une fois le chapeau et la veste de soldat retirés, il s’aperçoit du travestissement, le tout se terminant dans la joie. C’est également vrai pour le public, qui a perdu quelques spectateurs au cours d’une soirée par moments interminable, en raison de l’horaire tardif et de la longueur de la première pièce.

IF