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Chroniques
Le nozze di Figaro | Les noces de Figaro
opéra de Wolfgang Amadeus Mozart
Le nozze di Figaroest un opéra riche en surprises et coups de théâtre : sur un ordre du Comte, le jeune Cherubino est envoyé illico à la guerre, Marcellina se révèle la mère de qui elle souhaite épouser, sans parler des intrigues que Figaro met en place pour piéger son employeur, ainsi que les mensonges inventés quand les choses tournent mal. En définitive, l’imprévu semble favorablement accompagner jusqu’à la genèse de cette dénonciation des privilèges.
Ainsi, malgré les réticences de Louis XVI qui découvre la pièce de Beaumarchais en 1781, elle finit par être créée le 24 avril 1784, avec un beau succès, assuré notamment par les aristocrates qui viennent se moquer de leurs propres travers. Puis, alors que Mozart souhaite mettre en musique un texte interdit de représentation, le librettiste Da Ponte parvient à faire fléchir Joseph II en lui promettant de « faire disparaître tout ce qui pouvait choquer les convenances et le bon goût ». Enfin, quand le père même du compositeur redoute la pire des cabales de Salieri et de ses partisans, le triomphe est au rendez-vous – « tous les numéros furent bissés, ce qui fit durer la représentation aussi longtemps que celle de deux opéras […] ».
De la cuisine des domestiques à la chambre de la Comtesse, d’un couloir des pas perdus à la cave du château, le metteur en scène Jean Liermier suit ces personnages qui, grands et petits, ont accès à des lieux identiques dont les multiples entrées ne garantissent ni réelle solitude, ni intimité. Qu’Almaviva et Rosina frôlent le constat d’adultère, que Figaro retrouve des parents inconnus, tout se passe sous l’œil de témoins plus ou moins concernés – on pense, bien sûr, aux apparitions burlesques du jeune page, sortant d’une cuisinière ou d’un passe-plat. Les éclairages subtils de Jean-Philippe Roy ajoutent à la lecture cinématographique de « cette journée de tourments, de folies et de caprices ».
Outre un écrin soigné, cette coproduction lorraine avec le Théâtre de Caen réunit une distribution talentueuse. Patricia Petibon compose une Susanna attachante à la voix souple, et Hiromi Omura une Comtesse au chant brillant et corsé. Parfois caverneux, Jean-François Lapointe s’avère un vaillant Almaviva au timbre riche, tandis que Nicolas Cavalier, baryton d’une belle égalité de tessiture, livre un Figaro plein d’ampleur. Parmi les seconds rôles, citons Marcos Fink, très nuancé et à son aise en Bartolo, Diana Axentii qui compose un Cherubino avec une légèreté qui ne manque pas de corps, ou encore un Chœur expressif. En fosse, Juraj Valcuha, qui offre une ouverture presque trop énergique, ne manque pas, par la suite, d’être attentif au plateau et soucieux des nuances.
LB