Chroniques

par françois cavaillès

Le nozze di Figaro | Les noces de Figaro
opéra de Wolfgang Amadeus Mozart

Festival de Saint-Céré / Château de Castelnau-Bretenoux
- 8 août 2017
Nouvelle production des Nozze di Figaro, par Éric Perez
© nelly blaya

La nuit est promenade lyrique à présent, dans l'art et la manière du Festival de Saint-Céré. En programmant cet été deux œuvres incontournables, pleines de joie de vivre et de tendresse, l’aventure, bientôt quarantenaire, comble les appétits d'opéra, tous ceux, amis fidèles ou nouvelles flammes, qui remplissent largement les gradins par cette soirée fraîche au clair ciel étoilé (à part une menace d'orage... et pas davantage).

Avec, en premier lieu, Le nozze di Figaro, nouvelle production (en collaboration avec le Centre Lyrique Clermont-Auvergne et l’Opéra de Massy) au Château de Castelnau-Bretenoux (ah, le coucher de soleil idyllique...), gazouillent quelques oiseaux lors d’une Ouverture comme électrisée. Le courant passe tout de suite ! On a beau dire, encore bravo à l'Orchestre Opéra Éclaté, dirigé ce soir par Joël Suhubiette, qui trouve vite le rythme de croisière pour tracer, au gré des amours, le cours de cette folle journée. Et l'on a beau faire, c'est Mozart... et Beaumarchais, puisque des extraits de sa pièce Le mariage de Figaro remplacent les récitatifs en italien de da Ponte. À partir de l'adorable croisement de deux grands créateurs, la mise en scène signée Éric Perez fait se rencontrer le siècle des Lumières et le nôtre, avec un style simple et efficace dans les décors de Frank Aracil, les costumes de David Belugou, le jeu de scène et la gestuelle.

Mais le spectacle est surtout emporté par la jouvence du plateau vocal, chanteurs et surtout acteurs, à l'action souvent osée, aux élans audacieux, aux émotions urgentes. Sans prendre le texte au pied de la lettre ni suivre la partition à l'oreille tendue des sérieux mélomanes, il y a sincèrement du charme dans toutes les voix. Attention, notamment, aux soprani capables de se montrer absolument ravissantes le temps d'une seule aria – c'est le cas de Clémence Garcia (Barbarina). Dans la tessiture bénie d'Amadeus, Judith Fa (Susanna) est aussi fine dans la comédie modelée par le dramaturge français que brillante avec les airs du compositeur autrichien, tandis qu’est prometteur le duvet de Charlotte Despaux (Contessa), tout comme le baryton ferme du sculptural Anas Séguin dans le rôle de son mari autoritaire. Le Figaro de Jean-Gabriel Saint-Martin (baryton) et le Cherubino d’Eléonore Pancrazi (mezzo-soprano) brillent par alternance, dans cette belle galaxie de jeunesse.

L'opéra comme école de la vie, apprendre la main dans l'insondable sac à malices mozartien, en tant que public, interprètes, critiques, êtres humains... Mais voilà tout compte fait l'expérience d'amateur, au sens noble du terme, retirée en cet état d'esprit bien particulier de Saint-Céré (loin d'un « art total », dans le sens immodeste de Bayreuth ?...).

FC