Chroniques

par bertrand bolognesi

Le Parnasse français dirigé par Louis Castelain
grands motets de Jean-Baptiste Lully

Chapelle royale, Versailles
- 15 novembre 2008
Louis Castelain, patron du Parnasse français, ensemble baroque
© marco broggreve

Avant-dernier des douze concerts Lully donnés cet automne par le Centre de Musique Baroque de Versailles (CMBV) au château, ce rendez-vous avec les musiciens du Parnasse français fait entendre trois motets composés entre 1665 et 1677. Si l'on ne connaît pas dans quelles circonstances naquit O lachrymæ (placé ici au centre du programme), vraisemblablement datable de 1665 sans que l'on sache exactement quand et où en eut lieu la création, Te Deum laudamus fut donné à l'été de 1677 au château de Fontainebleau, tandis que Plaude lætare au printemps de 1668 à Saint-Germain-en-Laye.

Dès l'abord de Plaude lætare Gallia, la voix de Vincent Lièvre-Picard domine la distribution ici réunie. Outre un chant d'une élégance absolue, la clarté du timbre et la précision de l'émission capturent l'écoute. Au pupitre, Louis Castelain affirme la souplesse de son Parnasse en une inflexion toujours bien menée. On regrettera cependant qu'il n'ait pas choisi d'un peu plus ciseler le chœur qu'on aimerait plus incisif. O Jesu, vita credentium bénéficie d'une grande tendresse d'expression, soutenue par une écriture chorale plus intérieure.

Le chef engage O lachrymæ dans un tactus relativement fluide, laissant aux bois plutôt qu'à la grandiloquence virtuelle des cordes le soin de poser le recueillement. On découvre des voix féminines en général moins probantes que le pupitre des hommes où Benoît Arnoult surprend positivement par le chromatisme qu'il dessine aux ensembles. Après la réalisation particulièrement tonique des oppositions d'O fons amoris, la perfection médusante de la vocalise de Lièvre-Picard sur Cantica gloriæ ne saurait être plus d'à-propos.

Après la rigueur et la tristesse de cette œuvre en laquelle certains commentateurs ont cru voir une déploration de la mort de la reine Marie-Thérèse (survenue en 1683 alors que le motet est publié dans les Cantica pro Capella Regis de 1665, précise Thomas Leconte, ingénieur de recherches et responsable éditorial des collections critiques du CMBV), le Te Deum ne se contente pas de renouer avec le faste du premier épisode de la soirée, mais le décuple en convoquant timbales et trompettes. Incontestablement, Benoît Arnoult s'impose par l'évident impact de son grave et par un aigu qui s'est corsé. L'œuvre séduit par la pompe entretenue, mais aussi par des moments plus tendres où les voix se relaient sur la sobriété de l'orgue. Louis Castelain sait profiter en maître de raffinements qu'il transmet généreusement.

BB