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Chroniques
Lulu
spectacle de Mark Tompkins
Danseur, chorégraphe et pédagogue américain à l'origine du spectacle sous-titré Une opérette de circonstance, Mark Lewis Tompkins fonde, il y a plus de vingt cinq ans maintenant, la Compagnie I.D.A. (International Dreems Associated). Attentif à la diversité et à la promotion d'objets performatifs non identifiés, il varie les productions du solo – comme La Valse de Vaslav (1989) et Under My Skin (1996), hommages respectifs à Nijinski et à Joséphine Baker – à la comédie musicale (La vie rêvée d'Aimé, 1999) en passant par le vaudeville (Home, 1993) et le reality show (Gravity, 1996). Avec la vidéo, la musique est donc récurrente dans ses spectacles, surtout depuis sa rencontre avec Nuno Rebelo, guitariste et compositeur portugais, qui les conduira même à la formation d'un groupe de rock.
« La chose la plus difficile dans la durée, résume Tompkins, c'est comment faire pour ne pas se répéter, pour ne pas construire une machine à produire du spectacle ? Chaque création est une occasion de remettre en jeu nos acquis et nos certitudes et de questionner notre désir – et maintenant qu'est-ce que nous voulons raconter, qu'est ce qui nous importe aujourd'hui ? »
Aujourd'hui, ce qui l'intéresse, c'est de mettre en scène une femme fatale que Pabst (film muet de 1929) et Berg (opéra laissé inachevé en 1935) nous ont rendus familière. Le spectacle illustre alors cette chaîne des amants de Lulu à l'aide de la voix off, du dialogue théâtral (en français) et de chansons (en anglais). S'inspirant de l'opérette, ces dernières alternent avec des interludes symphoniques qui, par leurs procédés et leur instrumentarium (violon, hautbois, basson, cor, etc.), évoquent parfois ce que Michael Nyman a composé pour le cinéma de Greenaway, mais avec un surcroît dionysiaque de sensualité. Notons que le projet prévoit le remplacement de la bande son par l'intervention live de musiciens.
Pourquoi l'ennui nous gagne-t-il au fur et à mesure de la représentation ? Paradoxalement, c'est son manque de chair et d'émotions. Alors que des écrans encombrent l'avant-scène par des images redondantes (tigre, flammes, etc.), le plateau reste désespérément vide. Certes, la gymnaste de formation Alexandra Sarramona séduit par la souplesse de courbes irréprochables et une voix bien impactée à défaut d'être inoubliable ; certes, Tompkins soigne la caractérisation des différents amants incarnés par un chant assez instable ; mais rien ne vient surprendre, captiver. Sauf une minute, peut-être : lorsqu'un des assistants torse nu, dos au public, laisse échapper de son bonnet l'abondante chevelure blonde de la Geschwitz.
LB