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Chroniques
Macbet | Macbeth
opéra de Giuseppe Verdi
Conçu à la suite d’Attila (1846) [lire notre critique du DVD], Macbet est présenté d’abord au Teatro della Pergola (Florence) le 14 mars 1847, puis, dans sa version définitive, le 28 janvier 1874, à la Scala (Milan). C’est le premier ouvrage de Verdi adapté de Shakespeare (« un de mes poètes préférés, lu et relu sans cesse »), avant les célèbres Otello (1887) et Falstaff (1893) du crépuscule. Le compositeur lui-même fournit à ses librettistes, Francesco Maria Piave et Andrea Maffei, un découpage du drame original : les personnages secondaires y sont écartés, voire éliminés, et Macbeth rendu plus fragile face à une épouse qui devient la figure dominante de l’œuvre.
Les sorcières, également, intéressent Verdi. Vétéran de la Royal Shakespeare Company (1990-2002), Adrian Noble ne l’oublie pas quand, en 2007, il soigne leurs apparitions en commères de village (petit chapeau, collier de perles et sac à main muni d’une lampe qui éclaire leur visage au moment des prédictions), la démarche grotesque. Au troisième acte, elles mêlent des jouvencelles au rituel (filiation ? séquestration ?), juste avant l’arrivée des esprits (une sphère transparente sortie de la fumée, animée de visages successifs). Enfin, ce sont elles qui déroulent le chemin de chaises sous les pieds de l’héroïne, somnambule et désœuvrée.
Pour la quatrième fois consécutive, Anna Netrebko ouvre la saison du Metropolitan Opera. « Depuis ses débuts new yorkais, il y a douze ans dans Guerre et Paix de Prokofiev – précise le programme HD Live –, le public adule cette soprano lyrique pour son timbre chaud et opulent, et pour son physique de grand charme ». Comment lui donner tort ? Surtout si l’on y ajoute des qualités comme l’intelligence scénique et l’humour – questionnée à l’entracte par Anita Rachvelishvili, elle conseille aux téléspectateurs d’explorer, eux aussi, leur côté sombre, comme elle le fait en incarnant Lady Macbeth.
Sa simple lecture d’une lettre met en condition l’auditeur avant une première aria qui l’emporte et lui fait (re)découvrir une artiste phénoménale au service d’un personnage vénéneux, pétri d’ambition. La luce langue (II, 2) voit passer le soprano de la caresse à la fougue, tandis que son ultime intervention, Una macchia (IV, 4), offre un moment d’émotion sur le fil – semblable au final d’Anna Bolena (Donizetti) [lire notre critique du DVD]. Autant dire que nous serons présents, au soir de la prochaine Saint-Valentin, pour l’applaudir dans le rôle-titre d’Iolanta !
Le baryton serbe Željko Lučić (Macbeth) est une force tranquille, vaillant mais assez terne tout d’abord, qui brille davantage après l’entracte – ce qui met en relief sa quête illusoire du pouvoir. René Pape (Banquo) confirme sa basse solide, tandis que Joseph Calleja (Macduff) séduit par un ténor lumineux, pailleté de rocaille. Noah Baetge (Malcolm) retient également l’attention au sein d’une équipe soutenue en fosse par Fabio Luisi, abordant avec un moelleux ciselé frémissements et tensions de la partition. On n’en doute pas : en avril prochain, le Génois aura la même tendresse pour Mascagni et Leoncavallo.
LB