Chroniques

par katy oberlé

Nabucco | Nabuchodonosor
opéra de Giuseppe Verdi

Deutsche Oper, Berlin
- 14 janvier 2017
reprise du Nabucco (Verdi) de Keith Warner à la Deutsche Oper de Berlin
© bernd uhlig

Pour quelques représentations, la Deutsche Oper reprend la production signée Keith Warner il y a trois ans. La réalisation n’a rien d’indigent, avec le décor impressionnant de Tilo Steffens et les costumes précisément codés de Julia Müer, mais une jolie scénographie ne suffit vraiment pas à porter Nabucco. Le metteur en scène britannique semble ne s’être pas remis du piètre Tannhäuser qui avait tant exaspéré le public strasbourgeois, au printemps de la même année [lire notre chronique du 30 mars 2013]… Son Nabucco n’est pas plus inspiré, résumable à une Histoire universelle du terrorisme, avec cette idée assez intéressante, bien que justifiée par le seul besoin de rattacher à tout prix l’œuvre à notre présent, de présenter la Bible comme arme de guerre absolue – en 2005, les attentats islamistes de Londres l‘auront marqué. La sauce fige vite. On ne saisit pas vraiment le rôle de la confrontation des siècles au fil du spectacle. Surtout, tout le monde ne parle que voix et orchestre, comme si le facteur théâtre avait oublié de descendre de son cheval !

Plutôt que de m’obstiner et d’être ensuite accusée de tirer sur les ambulances, je serai de meilleure compagnie en ne m’attardant pas plus sur la production. Bien évidemment, ce qui frappe toujours lorsqu’on voit un Nabucco, c’est le chœur. Le Chor der Deutschen Oper Berlin se porte comme un charme ! Sous la direction de Raymond Hughes, il honore la célèbre partition de Verdi dont le Va, pensiero reste dans chaque tête. Avec une pâte vocale très onctueuse, grand format, la jeune Seyoung Park chante une Anna remarquable pour son legato magnifique. Le mezzo Irene Roberts affirme une voix aussi présente mais moins séduisante dans le rôle de Fenena, dont un vibrato en bourrasques perturbe trop souvent la ligne de chant.

En Grand Prêtre, Alexeï Botnarciuc fait bel effet, avec une basse puissante et une incarnation solide. Autre basse tout à fait concluante, avec un timbre inquiétant, Liang Li donne à Zaccaria un souffle étonnant. Ténor brillant dont l’impact ne demande qu’à s’étoffer, Robert Watson nous vaut un bon Ismaele.

Verdienne presque exclusive, Amneris très applaudie à Munich avec Jonas Kaufmann, Anna Smirnova est bouleversante en Abigaille : la voix est faite de telle sorte qu’elle domine tout, la fosse, les autres chanteurs, la mise en scène ! La conduite est sûre, nuancée sans en faire trop. Enfin, on retrouve Dalibor Jenis en roi de Babylone, Nabuchodonosor envahissant que le baryton slovaque a beaucoup chanté ces dernières années, qu’il chante toujours aussi bien et qu’on espère entendre encore souvent. Superbe !

Au pupitre de l’Orchester der Deutschen Oper Berlin, Paolo Arrivabeni ne se contente pas d’une lecture routinière de cet ouvrage qu’il connaît comme le fond de sa poche. La légèreté italienne est de la fête, la rapidité là où on l’attend, mais aussi cette sorte de profondeur propre aux orchestres non latins. Pas si mal, donc.

KO