Chroniques

par bruno serrou

Orchestra del Maggio Musicale Fiorentino
Zubin Mehta joue Brahms, Puccini et Rimski-Korsakov

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
- 21 janvier 2011
Zubin Mehta dirige l'Orchestra del Maggio Musicale Fiorentino à Paris (2011)
© dr

Phalange fondée en 1928 par Vittorio Gui pour devenir cinq ans plus tard l’orchestre du plus ancien festival musical d’Italie, l’Orchestra del Maggio Musicale Fiorentino est aujourd’hui l’une des formations les plus significatives d’Italie, pays sinistré en la matière. De qualités, elle n’en manque pas, comme l’a démontré ce concert. Même si, sous la direction de Zubin Mehta, son chef titulaire depuis 1985 et directeur honoraire à vie, l'alliage n'a pas pris entre l’orchestre italien, le chef indien et le compositeur russe Nikolaï Rimski-Korsakov dans la grande fresque d’inspiration moyen-orientale Schéhérazade. La direction de Mehta fut trop encline au rubato, avec des élans tirant à l’excès hollywoodien, voire, pire encore, vers les Studios Disney, tandis que l’orchestre donnait à entendre des couleurs étonnamment grises et défaites de toute sensualité.

Heureusement, le violon solo – était-ce Domenico Pierini ou Yehezkel Yerushalmi ?... aucun nom des membres de l’orchestre ne figurait dans le programme de salle – était au contraire lumineux, rappelant en de nombreux points les sonorités chatoyantes de Zino Francescatti.

En revanche, on retrouvait dans la Symphonie en ut mineur Op.68 n°1 de Johannes Brahms le Mehta grand architecte inspiré, doué d’un sens de la narration qui sied particulièrement aux longues phrases brahmsiennes, réussissant l’équilibre d’un savant dosage entre dramatisation, parfois douloureuse, et lyrisme chatoyant qui ont forgé sa réputation dans les années soixante-dix. L’orchestre florentin s’est fait ici chaud, sensuel, brillant, avec ses cordes de braise, ses bois onctueux, ses cuivres scintillants (magnifique cor solo).

En bis, l’interlude symphonique de Manon Lescaut de Puccini attaqué par un violoncelle et un alto qui semblaient se découvrir, suscita la réflexion d’un voisin à souligner que ces deux larrons auraient fort heureusement le temps, d’ici la prochaine édition du Maggio Fiorentino, d’apprendre à s’écouter l'un l’autre. La suite du morceau était heureusement plus en place, l’orchestre chantant, il est vrai, dans son jardin, dirigé par un chef familier de l’univers puccinien.

BS