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Chroniques
Orchestre national de Belgique, Hugh Wolff
Orchestre national de Lille, Jean-Claude Casadesus
Si les talents de la nouvelle génération constituent l'une des nefs principales du Lille Piano(s) Festival, ainsi qu'en témoigne la journée de dimanche 11 juin [lire notre chronique], l'accompagnement orchestral n'est nullement négligé, le directeur artistique, Jean-Claude Casadesus, étant par ailleurs le fondateur de l'Orchestre national de Lille – Alexandre Bloch vient de prendre le relais à la tête de la phalange nordique au début de la saison écoulée.
Avant de revenir sur le festin de clôture, confié, comme l'ouverture, à la formation de la maison, le concert du samedi, à dix-huit heures, invite son voisin l’Orchestre national de Belgique, placé sous la baguette d’Hugh Wolff. Avec Nelson Goerner en soliste [photo], leConcerto pour piano en sol mineur Op.16 n°2 de Sergueï Prokofiev déploie, dès l'Andantino augural, une virtuosité efficace et sans ostentation qui trouve dans le chef un partenaire de choix. L'instinct rythmique du compositeur russe se reconnaît dans les brefs Scherzo et Intermezzo, détaillés sans mécanisme réducteur, avant un final maîtrisé. Sans renier le romantisme de l’œuvre, les interprètes ne cherchent pas à l'exacerber inutilement.
Cette conception se révèle bénéfique aux trois mouvements desDanses symphoniques Op.45 de Sergueï Rachmaninov (Non allegro ; Andante, tempo di Valse ; Lento assai, allegro vivace, lento assai come prima, allegro Vivace) qui résonnent comme le testament d'un musicien accompli, sans dévoyer l'émotion qu’ils contiennent. Pour être sensible, l'évocation n'en demeure pas moins d'une sobriété appréciable.
Le lendemain, le dernier concert s'ouvre sur une salve de remerciements de Jean-Claude Casadesus, avant d'emmener ses musiciens de l’ONL et les deux solistes, Hélène Mercier et Louis Lortie, dans l'inimitable ballade pastiche du Concerto pour deux pianos en ré mineur de Francis Poulenc. La toccata de l'Allegro ma non troppo ne s'abîme pas dans les décibels et, sans renier le contraste d'atmosphère, ne disjoint pas l'humour de la première partie avec la tendresse rêveuse et la mélancolie apaisée de la seconde. La prudence de l'orchestre rehausse les couleurs mozartiennes du Larghetto, parfois aux confins de la citation, quand la vitalité de l'Allegro molto ne s'abandonne pas au mauvais goût.
Avec Nicholas Angelich, les pupitres lillois distillent progressivement le foisonnement du Concerto pour piano en ut majeur Op.26 n°3 de Prokofiev. Après un premier mouvement dense et équilibré, l'Andantino con variazoni témoigne de la profondeur poétique du pianiste nord-américain, laquelle se confirme dans un Allegro ma non troppo qui n'oublie pas la sincérité dans l'éblouissement sonore.
On ne saurait mieux refermer cette édition du Lille Piano(s) Festival.
GC