Chroniques

par richard letawe

Orchestre Philharmonique Royal de Liège
musiques de scène nordiques par Hannu Lintu

Les nuits de septembre / Salle Philharmonique, Liège
- 8 septembre 2007
le chef d'orchestre Hannu Lintu, photographié par Kaapo Kamu
© kaapo kamu

Sous la direction d’Hannu Lintu, l'Orchestre Philharmonique Royal de Liège donne ce soir son premier concert de saison, lequel ouvre également la programmation des Nuits de septembre que la formation co-organise depuis deux ans. Ce festival a été créé il y a cinquante ans tout juste ; il est l'un des plus anciens de Belgique, membre à part entière du Festival de Wallonie, avec les Musicales de Namur, le Juillet musical de Saint Hubert et les festivals de Stavelot, Hainaut et Brabant wallon.

Ce concert d'ouverture a pour thème la musique de scène, avec deux œuvres nordiques : Pelléas et Mélisande de Sibelius, puis Peer Gynt de Grieg. Sibelius a composé sa musique pour Pelléas en 1905, à l'occasion d'une représentation de la pièce de Maeterlinck à Helsinki, puis en tira une suite de concert méconnue, rarement jouée, peu enregistrée, même par les orchestres scandinaves – on la trouver dans un disque exemplaire de la Česká Filharmonie, dirigée par Serge Baudo (Supraphon). Pourtant, cette page recueillie mais facile d'accès est d'une grande beauté, subtile et mystérieuse. Certains de ses neuf mouvements – en particulier le dernier, La mort de Mélisande – ne dépareraient pas les meilleures symphonies du compositeur. Hannu Lintu en donne une version qui combine expressivité intense et grande lisibilité, avec un sens remarquable de la ligne et de l'équilibre. Il caractérise chaque partie, lui donnant son exact climat, du solennel Prélude à la pittoresque Pastorale, et obtient de l'OPRL une réponse d'une qualité superlative à ses instructions, avec des vents brillants et précis, des cordes claires et nuancées, capables des plus fines variations de dynamique. La mort de Mélisande s'avère intense et bouleversante, suivie par un silence contrit.

Après cette magnifique découverte suit Peer Gynt dans lequel le chef opère une sélection. Hannu Lintu n'y va pas par quatre chemins et s'engage avec passion dans la partition. Sa direction très virtuose ne répugne pas aux gestes les plus amples et les plus théâtraux. On pourrait penser qu'il est en plein show, qu'il en rajoute un peu dans un registre cabotin, mais il est efficace, donnant aux pages les plus clinquantes et rabâchées de l'œuvre des accents nouveaux, inattendus et jamais forcés. Dans les passages plus touchants, comme Mort d'Åse, il se concentre et insuffle profondeur et émotion, avec une économie de moyens et de gestes remarquable. Dans Chanson puis Berceuse de Solveig, le jeune soprano Céline Scheen surprend par une voix ample et sombre (qu'on pourrait supposer cristalline, de prime abord), au timbre riche en harmoniques. Les aigus sont un peu fragiles à l'émission, mais ils prennent ensuite une belle ampleur. Elle chante avec beaucoup d'implication, de puissance et de générosité. En fin de soirée, elle « bisse » la Chanson de Solveig, au plus grand plaisir d'un public ravi.

RL