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Chroniques
percussions en chambre I
Bartók, Berio et Mantovani
Premier d’un cycle de trois jours consacré aux affinités musicales, ce concert de 18h met en avant les percussions dans la musique de chambre. Apparues dans les formations réduites aux alentours des années vingt, elles prirent peu à peu de l’importance, comme il est ici démontré.
Créée à Grenoble en 1974, dédiée au critique de danse Vittoria Ottolenghi, la pièce de Luciano Berio Linea se compose de treize courts mouvements qui s’enchaînent subtilement, sans l’ombre d’une rupture. L’œuvre commence par un dialogue tout en délicatesse entre les deux pianos, le vibraphone et le marimba, dont l’acoustique de la salle ne nous écarte pas. Cependant, si l’énergie des forte n’est pas exempte de la partition (Allegro), il faut bien reconnaître une sécheresse assez désarmante des pianissimi. L’explication vient sans doute de ce que Linea était destinée à accompagner une chorégraphie de Félix Blaska, et que la chair dont elle semble manquer n’était autre que celle des neufs danseurs.
Plus proche de nous, Haunted Night voit le jour le 9 août 2002.
Avec cette commande du festival Musique à l’Emperi dont le titre est emprunté à un standard de jazz composé par Duke Ellington dans sa période jungle, Bruno Mantovani signe une de ses nombreuses pièces « reposant sur le conflit et la juxtaposition ». Comme son nom l’indique, ce morceau d’une douzaine de minutes s’avère assez agité, avec des effets de crescendo ou decrescendo récurrents livrés par le piano, le vibraphone et la clarinette – depuis Bug et Da Roma [lire notre chronique du 22 septembre 2006], on connaît le goût de Mantovani pour cet instrument. C’est un solo de Bertrand Chamayou qui sert de transition entre une première partie qui semble monochrome mais capte subtilement l’attention, et une seconde aux contrastes aérés, nourrie de clavier martelé et d’un ostinato des lames.
Enfin, on ne présente plus la Sonate pour deux pianos et percussion de Béla Bartók, composée en 1937 et créée à Bâle l’année suivante. L’œuvre est brillamment donnée par des interprètes qui en révèlent toute la richesse de textures et de couleurs. Bertrand Chamayou et Jonas Vitaud l’abordent dans un moelleux lentement lyrique, une douce introspection (deuxième mouvement) avant de s’abandonner au pétillant du final. De leur côté, les percussionnistes Emmanuel Curt et François Desforges (dont le rôle, selon le souhait du créateur, est de nuancer la sonorité du piano, d’opposer des motifs contrapuntiques, etc.) ne manquent pas de délicatesse et d’intensité.
LB