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Chroniques
Philip Glass Ensemble, a forty-year retrospective
Unir ses forces, mêler arts visuels d’aujourd’hui et musique contemporaine (ou quasiment), en un lieu mixte, l’espace d’un festival Nouveau Siècle où se mêlent écoute et regard en un site unique de la cité stéphanoise – plus exactement de la structure élargie de Saint-Étienne Métropole – : c’est l’aventure dans laquelle, de concert… et même de concerts et d’actions pédagogiques, se sont lancés l’Opéra-Théâtre et le Musée d’art moderne. Un temps fort en manière de lancement : une soirée « auditive » qui se passe dans une salle du musée, après visite aux œuvres picturales et graphiques américaines, des années 1969-1970 pour l’essentiel, exposées tout près ; une soirée consacrée à l’un des leaders du courant minimalisme né à New York, justement dans les années soixante à quatre-vingt : Philip Glass, présent sur scène et interprétant quelques-unes de ses partitions devant un public d’environ cinq cents personnes, visiblement comblé.
Comme les autre tenants de la veine répétitive qui, à la fin du siècle dernier et au Nouveau Monde, triomphait face au sérialisme, l’autre grand courant de l’époque, ancré dans l’Ancien Monde, Philip Glass est-il encore contemporain ? La question mérite d’être posée et les amateurs de concision dans un discours musical, quel qu’il soit, du médiéval à celui d’aujourd’hui, ne peuvent que mal noter le genre. Une chose est sûre : certains moments s’avèrent d’une grande intensité, font naître une indicible émotion, créent un univers impalpable autant que fascinant. Le tout est de rester « branché », de ne point « décrocher » au risque de se sentir exclu de la longue « litanie ».
La rétrospective – a forty-year retrospective – permet de passer en revue plusieurs des mondes imaginés par le compositeur [lire notre critique de l’anthologie Nonesuch]. Ce sont plutôt des fragments, des entités, des unités, points forts et moments intenses, d’une séquence extraite de la monumentale Music in Twelve Parts (durée totale : quatre heures !), conçue de 1971 à 1974, à une autre puisée dans la fameuse Civil Wars écrite lors de l’ouverture des JO de Los Angeles en 1984, avant un final empruntant au légendaire Einstein on the Beach [lire notre chronique du 16 mars 2012], opéra créé au Festival d’Avignon 1976, en passant par plusieurs autres pages.
L’écoute de l’ensemble permet de bien cerner les grandes constantes de cette musique : simplicité de la forme ; emploi percussif des instruments, avec habilité, maîtrise et expressivité, modulations toujours (ou presque) légères, subtiles, évolutives mais répétées à l’infini, avec ici une composante sidérante : la maestria avec laquelle les interprètes du Philip Glass Ensemble possèdent, illustrent, défendent, bref font vivre ce monde si particulier, en compagnie du compositeur lui-même, passant avec le même bonheur d’un clavier à un autre, d’un bois à un autre, sans oublier la voix. Petit bémol : bien équilibré dans la première partie, le pôle mixage en temps réel, fondamental dans ce message musical, force trop le décibel dans la seconde.
GC