Chroniques

par bertrand bolognesi

Quatuor Ébène

Festival Jeunes Talents / Hôtel de Soubise, Paris
- 25 juillet 2003
les jeunes musiciens du Quatuor Ébène
© dr

Notre édito l’annonçait il y a quelques semaines : le troisième Concours International de Quatuor à Cordes de Bordeaux n’accorda pas de premier prix cette année. En revanche, le Quatuor Ébène, que nous avons le plaisir d’entendre ce soir, y décrochait un deuxième prix (ex-æquo avec le Quatuor Aviv) et le prix de la SACEM. Quatre étudiants se rencontrent au CNR de Boulogne et créent un jeune quatuor qui verra vite son travail couronné d’un premier prix de musique de chambre, à l’unanimité, avant d’intégrer la classe du Quatuor Ysaïe au CNR de Paris, chacun des quatre musiciens étant élèves du CNSM de Paris ou de Lyon. L’an passé, Ébène obtint une bourse du ministère de la culture.

Sa lecture du Quatuor en mi bémol Op.127 n°12 de Beethoven souffre cependant d’un choix de sonorité peu flatteur. Attaques aigres, soucis d’accord omniprésents, l’œuvre n’est qu’approximativement honorée. Certes, il n’est pas facile d’évoluer dans la délicate et complexe forme du premier mouvement, mais sans doute est-il possible de l’articuler d’une façon plus intelligible. On goûte de beaux échanges dans l’Adagio, les savantes syncopes du violoncelle de Raphaël Merlin forçant le tempo juste ce qu’il faut. Les variations s’enchaînent discrètement, avec une évidente fluidité. Si le Scherzo reste peu convainquant, l’interprétation du Final, et tout particulièrement de sa Coda, s’affirme des plus enthousiasmantes. Malgré tout, une sonorité plus pleine n’y serait pas de trop. On regrettera quatre mouvements joués sans véritable unité, manquant vraisemblablement d’une vue plus large pour aboutir aux mesures finales.

La deuxième partie du concert est consacrée au Quatuor en fa majeur que Maurice Ravel écrivit à vingt-six ans, ce qui avait alors stupéfié ses contemporains. Un quatuor de jeunesse, donc, par un jeune quatuor... Le Quatuor Ébène semble faire sienne l’œuvre de Ravel. Des échanges pleins d’esprit, une sonorité riche, sensuelle, une délicieuse mobilité des tempi, construisent une interprétation passionnante. Les pizz’ du Scherzo s’avèrent d’une précision rare et d’une saine tonicité. Les quatre personnages de cette page se retrouvent en un Andante parfaitement équilibré, avant de finir brillamment. Félicitons chaleureusement l’altiste Mathieu Herzog auquel l’on doit des moments précieux.

BB