Chroniques

par laurent bergnach

Quatuor Habanera
œuvres de Donatoni, Leroux et Stroppa

Journées du Saxophone à Paris / Ircam, Paris
- 6 novembre 2009
Habanera, quatuor de saxophones, joue Donatoni, Leroux et Stroppa
© artkas

Organisées en collaboration avec la Société française d’acoustique, le Conservatoire de Paris ainsi que les associations A.Sax et Saxophone-événement (entre autres), ce concert clôt les Journées du saxophone à Paris. Première des œuvres au programme, L’Astre échevelé doit son nom à un texte d’Antonin Artaud, L’Enclume des forces. Le tubiste Gérard Buquet a dédié à son créateur Marcus Weiß (Trio Accanto, Ensemble XASAX) cette pièce qui complète un cycle consacré aux relations entre art et maladie mentale, à la suite de Surimpressions (évoquant Friedrich Nietzsche) et Die Malerin von Bellevue (Elsa Blackenhorn). Accompagnant un saxophone soprano plutôt virtuose, l’électronique recèle un petit orchestre « qu’il serait impossible de faire jouer en situation de concert en raison notamment d’enchaînement rapides de multiphoniques pour le saxophone, d’un dispositif trop complexe à gérer in situpour les harpes préparées et de fréquents changement de timbre pour les ondes Martenot ». Résistant aux possibilités baroques qu’offrent un orchestre virtuel, félicitons le compositeur d’avoir su doser la charge et les acmés de la partition enregistrée, afin de laisser la vedette au soliste. On est moins convaincu par la voix de récitant qui arrive à mi-course, oscillant entre Jeanne Moreau et Gollum…

Travaillant actuellement sur un projet de théâtre musical (Re Orso, d’après un texte d’Arrigo Boito), Marco Stroppa livre avec …of Silence une pagce pour saxophone alto et électronique de chambre qui tient compte de l’espace scénique. D’abord caché derrière le totem constitué de cinq petits haut-parleurs, Claude Delangle (créateur de cette pièce au Japon, le 23 novembre 2007) joue ensuite de profil, puis dos au public. Discrète pour commencer, la musique qu’il délivre entre dans une douce ébullition, riche en contrastes, avant de devenir percussive. Plus variée en sonorités que la précédente, la partie enregistrée partage la même qualité de saine légèreté.

Depuis 1993, Gilles Tressos (saxophone baryton), Christian Wirth (soprano), Fabrizio Mancuso (ténor) et Sylvain Malézieux (alto) forment le Quatuor Habanera [photo], lequel propose Rasch 1, entre les deux pièces solo que nous venons d’évoquer. Dédiée au Quatuor Rascher qui la créa en Autriche, le 6 octobre 1990, cette pièce de Franco Donatoni « est composée de neuf manipulations d’un même matériau initial – qui en constitue l’exposition ainsi que la première manipulation – progressivement transformé, filtré, condensé en une forme peu à peu réduite (…) ». La netteté des attaques y contraste avec des effets séduisants, tel un cor embrumé ou un bourdonnement amplifié.

Pour finir, cette formation offre une œuvre de Philippe Leroux initialement conçue pour quintette à vent. Souffles (1996) engendre Du souffle (2004), « musique de continuum entre différents états de figures et de matières sonores mais aussi de hauteurs, de timbres et de rythmes ». Tentant de servir une certaine simplicité (des gestes sonores, du rythme, etc.), son auteur ne rechigne pas à la moquerie, voire à la pitrerie.

LB