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Chroniques
récital Karine Deshayes
Nicolas Chalvin dirige l’Orchestre des Pays de Savoie
L’ami Berlioz n’appréciait point trop l’opéra italien, alors très en vogue des deux côtés des Alpes, et lui préférait volontiers la musique populaire ultramontaine qu’avec infiniment de plaisir il avait entendu lors de son séjour romain. Néanmoins, le genre fascinait alors grandement le public français, un public qui applaudissait chaudement Rossini, Cherubini, Spontini, bref tout ces Italiens au faîte de la gloire, ayant volontiers adapté leur écriture aux conventions du grand opéra à la française lorsqu’il s’agissait d’écrire pour Paris.
Défenseur d’Hector, pouvant revendiquer, en cet été pourtant pluvieux, un taux record de spectateurs, Bernard Messina, directeur de l’emblématique Festival Berlioz de La Côte-Saint-André, ne manque pas d’humour. Au point de consacrer l’intégralité d’un concert de l’édition 2012 à ces succès lyriques de jadis, déclinés à travers ouvertures, ballets et chants mêlés. Ainsi La vestale, ouvrage bien oublié de Gasparo Spontini, archétype de l’opéra classique napoléonien, d’abord créé en français à l’Opéra de Paris, ensuite (et ensuite seulement) donné en version italienne dans la péninsule voisine ; ainsi l’inusable Barbiere de Rossini, devenu dans l’Hexagone Le barbier de Séville ; ainsi la Maria Stuarda de Donizetti, etc.
Pour cette promenade lyrique, notre directeur s’est attaché trois éléments : un mezzo-soprano français rompu à ce répertoire, un orchestre savoyard et un jeune chef ayant, depuis quelques années, la responsabilité artistique de celui-ci. Un choix tant judicieux qu’excellent qui se révèle aussi convaincant que brillant, faisant de la soirée une suite d’oasis vocaux et instrumentaux.
Karine Deshayes possède à la fois la voix et l’expression vocale qui sied. Une voix claire, agile, mais solide et corsée, chaude et bien modulée, qui se plie avec bonheur aux demi-teintes contenues dans l’air d’Adalgisa de Norma de Bellini, mais se joue aussi, avec assurance et brio, des difficultés accumulées par Rossini dans le fameux Tanti affetti de sa Donna del lago. De son côté, le maestro Nicolas Chalvin, développant une direction précise, racée, lyrique et enthousiaste, s’avère un styliste parfait, sachant tirer infiniment de beautés de son Orchestre des Pays de Savoie, entraîné, emporté, visiblement subjugué par son leader, et dont les pupitres rivalisent d’ardeur et de musicalité. Que du plaisir pour l’auditeur !
GC