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Chroniques
récital Rossini de Jessica Pratt et Cecilia Molinari
Carlo Tenan dirige l’Orchestra Sinfonica Gioachino Rossini
Faisant suite à la défection de Varduhi Abrahamyan, distribuée par ailleurs dans Semiramide, c’est le mezzo Cecilia Molinari qui chante au côté de Jessica Pratt, les deux interprètes entendues dans Demetrio e Polibio se retrouvant ainsi pour un programme exclusivement consacré à Rossini.
Après une Ouverture alerte de L’Italiana in Algeri, Cecilia Molinari démarre par Tancredi, avec une couleur vocale qui correspond au personnage, dès le récitatif O patria! Puis le chant appliqué, bien conduit et fort souple sert au mieux la cavatine Tu che accendi questo core. L’instrument n’atteint sans doute pas les mêmes graves, presque masculins, que certaines de ses consœurs, mais le registre aigu est facile, la voix très saine et la technique bien en place. L’accompagnement apporte toutefois moins de satisfaction, l’Orchestra Sinfonica Gioachino Rossini se montrant techniquement limité. Le chef Carlo Tenan imprime un tempo curieusement lent, puis paraît par moments courir après le rythme.
Jessica Pratt enchaîne avec l’air très fleuri Cingi la benda candida extrait d’Adelaide di Borgogna où elle montre ses atouts : musicalité sans faille, alternance des nuances forte et piano, possibilités impressionnantes d’excursion vers l’aigu et le suraigu. Le volume reste mesuré dans le médium et s’épanouit plus généreusement dans le registre suraigu. Le soprano ne semble pas forcément au maximum de ses moyens au cours des successions de vocalises et notes piquées mais, à sa décharge, il est certainement compliqué de commencer un concert avec cet air, véritable feu d’artifice vocal.
Le duo Zelmira/Emma qui suit, Perché mi guardi, e piangi?, bénéficie à notre sens du meilleur soutien musical du concert, la harpe et le cor anglais sur scène réalisant un sans-faute aux couleurs mélancoliques, dans le silence absolu de la salle. Les voix sont magnifiquement appariées, bien conduites et dans une grande douceur. Retour à un titre plus connu, ensuite, avec Contro un cor du Barbiere di Siviglia, attaqué de manière nettement désordonnée par l’orchestre qui ainsi contraste beaucoup avec le chant élégant et appliqué de Cecilia Molinari. Jessica Pratt interprète dans la foulée le rondo extrêmement brillant Ami alfin e chi non ama, longue scène finale de l’opéra Matilde di Shabran [lire notre chronique du 27 juillet 2019] où elle démontre une entière assurance sur toute la longueur de la tessiture, lançant en particulier certains aigus comme des flèches.
Dans l’Ouverture d’Otello, les bois ne font pas tous preuve de la même virtuosité ; le hautbois s’en sort avec l’aide du chef qui demande un rythme ralenti et la clarinette ne rencontre pas de problème, ce qui n’est pas exactement le cas de la flûte, beaucoup plus à la peine. Le programme se conclut par le duo L’aura che intorno spiri d’Amemaide et Tancredi, savant équilibre entre deux lignes vocale entrelacées. En bis est donné un autre duo, Questo cor ti giura amore, provenant de Demetrio e Polibio, évidemment très bien rodé puisque les deux artistes défendent ce titre à l’affiche de l’édition 2019 du Rossini Opera Festival [lire notre chronique de la veille].
IF