Chroniques

par bertrand bolognesi

Remix Ensemble
Bianchi, Moreira et Rzewski

Musica / Cité de la Musique et de la Danse, Strasbourg
- 25 septembre 2010

Cet après-midi confié à l’ensemble portugais Remix s’ouvre sur Limiar, autrement dit Seuil, conçu par Daniel Moreira l’an dernier, s’inspirant de l’Es werde Licht du Haydn de Die Schöpfung. « Représenter un moment de radicale discontinuité, se basant sur la définition d’un ensemble de polarisations », s’en explique le compositeur (programme de salle, traduction Catherine Dumas, Musica 2010). La pièce est initiée par un souple geste tout élégance, tendu bientôt par des parties de bois volontiers lyriques. Après une paisible autant qu’énigmatique extinction, ou encore raréfaction, une nouvelle section bondit soudain dans la narration, frémissante, effervescente, vibrante. Tout en vérifiant un langage souverainement personnel, la référence à Haydn joue de grandes résolutions tonales, à peine maquillées, d’une inventive mobilité.

Cette édition du festival Musica permettra d’entendre quatre opus d’Oscar Bianchi, dont deux aujourd’hui même, donnés en première française (de même que la pièce précédemment commentée). Tout d’abord Trasparente II, une œuvre regardant les matériaux explorés quelques années plus tôt par le compositeur italien. D’emblée se distingue une certaine facilité d’écriture, non abusivement usitée, d’ailleurs. C’est surtout son énergie qui saute à l’oreille, bénéficiant ici de cette tonicité propre aux petites formations – à l’inverse de l’engluement que subit Ajna Concerto hier soir [lire notre chronique]. Trasparente II alterne des déclinaisons tendues à des respirations plus lâches, toujours ciselées par une harpe extrêmement présente, et s’achève comme naturellement, sans autre forme de final.

Si le raffinement des timbres séduit, la seconde page au programme, Anahata Concerto, convainc par sa nerveuse articulation, ses ostinati fleurant bon leur stravinkysme et plus encore le Ligeti des Bagatelles. Dans toute une série de pièces, Oscar Bianchi s’est interrogé sur les sept chakras ; ici, il s’agit du quatrième qu’il nous définit comme « la capacité à prendre des décisions en dehors du domaine du karma ». Aussi divers événements musicaux y entrent-ils en jeu – opposition, répons, superposition, lutte, etc.

Au centre du menu, le quarantenaire Coming Together du minimaliste Rzewski : I… think… it is… … not… necessary to… talk… … … about… … … … …it – si vous me le permettez !

BB