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Chroniques
Semiramide | Sémiramis
opéra de Gioacchino Rossini (version de concert)
À coup sûr, voilà l’un des ouvrages les plus étonnants dans l’abondante production rossinienne : Semiramide est à la fois le plus éclatant, le plus étincelant, le plus fourni en ornementations vocales de toutes sortes et dans tous les registres (une véritable débauche !), mais aussi l’un des grands titres les moins souvent représentés sur nos scènes lyriques. Régulièrement, quelques théâtres osent la chose et y réussissent [lire notre chronique du 26 novembre 2010]. Ce n’est pas tout à fait le cas de l’Opéra national de Lyon qui – hélas ! – ne risque qu’une version de concert, donnée durant deux soirées in loco, et obscurcissant encore un peu plus les péripéties (où se mêlent drames passés et intrigues présentes) du livret de ce melodramma tragico de Gaetano Rossi, deux longs actes inspirés d’une tragédie mineure de Voltaire.
N’empêche, côté solistes à une exception près, côté chœurs, côté orchestre et coté chef, tout fonctionne à merveille et l’enchantement musical dure des premières notes de l’éclatante Ouverture jusqu’aux dernières mesures du finale. Le grand architecte de cette éblouissante construction sonore est, bien sûr, le chef Evelino Pidò, grand spécialiste du répertoire belcantiste qu’il fait briller sous les feux des festivals les plus prestigieux et aux quatre coins du monde. Il élabore une extrême musicalité du tissu instrumental, à chaque instant, stimulant les envolées lyriques des voix et amalgamant avec art les interventions chorales, tout en faisant une place de choix à la fosse dont chaque pupitre est parfaitement mené, avec raffinement. Toujours aussi solide, le Chœur « maison », dirigé par Gianluca Capuano, donne le meilleur de lui-même, ainsi que les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon.
Côté solistes, le personnage du jeune premier, Arsace, bénéficie de la vocalité volontaire, mais souple et déliée du mezzo-soprano Ruxandra Donose, très à l’aise dans l’aigu comme dans la demi-teinte, alors que le rôle éponyme, celui (écrasant) de la reine Sémiramis, profite bientôt des beaux élans du soprano Elena Moşuc, prenant vite de l’assurance, de la puissance et maniant les trilles avec éclat. Autre pilier de la distribution, Assur, le sombre méchant, trouve avec Michele Pertusi la solidité et la clarté d’émission exigées. Dans le rôle d’Idreno, lui aussi fort lourd à porter, le ténor John Osborn développe un phrasé expressif et charmeur dans le mezzo voce, mais aussi – hélas ! – un aigu dur, agressif et trop vibré dans le forte. En revanche, Patrick Bolleire (Oroe) et Anna Pennisi (Azema), complètent avec infiniment de bonheur et de justesse la distribution de cette grande fresque.
GC