Chroniques

par bruno serrou

Stephen Kovacevich, Orchestre de Paris, David Zinman
Marc-André Dalbavie | Variations orchestrales sur une œuvre de Janáček

Salle Pleyel, Paris
- 17 novembre 2010

Ce concert de l’Orchestre de Paris était excellemment dirigé par David Zinman. Le chef étatsunien est l’un des plus grands directeurs d’orchestre de notre temps. Son travail à la tête de l’Orchestre de la Tonhalle de Zurich, dont il a fait l’une des plus belles phalanges d’Europe, l’atteste indubitablement. Ses interprétations séduisent par leur modération, le classicisme que ce forgeur transmet à toutes les œuvres qu’il aborde, des plus simples aux plus complexes, leur donnant ainsi un tour toujours clair et naturel.

De ce fait, malgré la portée relative de la pièce donnée en ouverture composée par Marc-André Dalbavie, des Variations orchestrales sur une œuvre de Janáček créées à Tokyo en août 2006, l’ensemble de la soirée est pur enchantement. Curieusement dédiée à Henri Dutilleux, l’œuvre de Dalbavie, d’une vingtaine de minutes qui tirent en longueur, se fonde sur la quatrième des pièces (Presto en ré bémol majeur), la plus virtuose du cycle pour piano V Mlvach (Dans les brumes) que Leoš Janáček composa en 1912. Si l’on admire son talent d’orchestrateur, l’on reste dubitatif quant à la motivation du compositeur, dont l’inspiration semble ici tourner à plat, peut-être trop admiratif de la musique qui l’inspire.

Le Concerto pour piano en ut majeur Op.15 n°1 de Beethoven est l’occasion de la première prestation de Stephen Kovacevich avec la formation parisienne. En effet, aussi étonnant que cela puisse paraître, cet immense pianiste étatsunien de soixante-dix ans ne s’était jamais produit avec elle depuis sa création en 1967, alors même que quantité de ses consœurs et confrères de moindre envergure y sont régulièrement invités. Ce grand interprète du maître de Bonn donne du premier de ses cinq concerti une lecture limpide, sereine, merveilleusement onirique.

Autre œuvre en ut majeur, la Symphonie n° 9 « la Grande » de Schubert – en fait la première symphonie de la maturité du Viennois à qui la mort coupa trop tôt les ailes, et qui s’impose ce soir comme un remarquable orchestrateur tout en restant un incomparable mélodiste. À la tête d’un Orchestre de Paris éblouissant et de toute évidence heureux d’être dirigé par un chef de cette dimension, David Zinman livre de ce chef-d’œuvre symphonique une interprétation fluide, aérienne, tendrement poétique.

BS