Recherche
Chroniques
The Saint of Bleecker street | La sainte de la rue Bleecker
opéra de Gian Carlo Menotti
Dans l’aréopage musical des années 1950-1960, Gian Carlo Menotti est un cas à part. À mi-chemin des rives de la tradition lyrique postvériste aux fêlures innovantes alors apportées par certains de ses confrères, il apparaît comme un solitaire, ayant connu un succès marqué sur les grandes scènes internationales, succès que la postérité de notre siècle naissant n’a pas vraiment sanctifié. À côté du regard sur la condition humaine, volontiers solitaire, qui scelle plusieurs de ses partitions, on peut ajouter, dans sa Sainte de Bleecker street (création au Broadway Theatre, le 27 décembre 1954), une approche du mysticisme à la fois fascinée, intriguée et un rien sceptique, amalgame peut-être issu des relations pas franchement cordiales que le compositeur entretint avec le fameux Padre Pio qui attirait alors des foules de catholiques exaltés.
Cette foule croyante – certains diront crédule –, fervente, ici soumise aux injonctions du terrible Don Marco, vivant au cœur du quartier italien de New-York, en marge de la grande cité américaine, cultivant le souvenir du pays natal par le biais d’un catholicisme sourcilleux, apparaît comme l’un des personnages principaux du drame écrit et composé par Menotti, personnage collectif ultra présent, face à l’autre héroïne, la solitaire Annina qui trouve en Dieu, où dans l’image qu’elle s’en fait (n’est-ce pas la même chose ?), un réconfort, un but, un chemin vers le salut de l’âme.
Pour la nouvelle production présentée par l’Opéra de Marseille, dans les décors très en situation de Jamie Vartan, les costumes idoines de Katia Duflot et les judicieux éclairages de Simon Corder, le metteur en scène Stephen Medcalf fait se mouvoir avec infiniment de brio les Chœurs maison, superbes de cohésion et de musicalité, comme le soprano Karen Vourc’h, touchante dramatiquement, vocalement à son aise dans le rôle de la sainte qui semble écrit pour elle. Les autres personnages sont fort bien tenus, tels Don Marco par Dmitri Ulyanov et Desideria par Giuseppina Piunti.
L’autre grand gagnant de la soirée est le chef Jonathan Webb lequel, à la tête d’un orchestre maison d’une belle eau, dose avec maîtrise les élans et les nuances, construit et conduit avec art les épisodes choraux et les ensembles concertants.
GC