Chroniques

par anne bluet

Antonio Vivaldi
Le quattro stagioni

1 CD Opus 111 / Naïve (2003)
OP 30363
Antonio Vivaldi | Le quattro stagioni

Est-il un ensemble baroque qui n'enregistre pas le célébrissime cycle de concerti du maître vénitien ?...

Le Concerto Italiano a pris son temps, et aborde l'œuvre après avoir amorcé une vraie carrière vivaldienne par ailleurs. Rinaldo Alessandrini propose chez Opus 111 une version d'une fidélité rare, qui souligne le climat propre à chaque épisode, décrivant avec minutie paysage, lumière, personnages, éléments.

Mais toute interprétation des Saisons ne se fixe-t-elle pas un tel credo ? J'imagine que oui, mais trop souvent en forçant quelque peu l'expressivité au détriment d'une cohérence, face à la date de création de l'ouvrage comme à celui du propos formel. Ici, le titre du recueil n'est pas oublié : Il cimento dell'armonia e dell'invenzione – qu'on pourra traduire par L'épreuve de l'harmonie et de l'invention, et comprendre comme la lutte entre la structure, la forme générale, et l'ornementation, la souplesse de la phrase, la liberté retrouvée. Vaste projet !

Si la présente version n'hésite pas à contraster chaque partie, elle réussit étonnamment à intégrer un art du détail à un tout parfaitement architecturé. Tout cela avec une grande élégance, un style parfait, quelque chose qui avance déjà vers le classicisme. On pourra estimer que ce disque incarne le contraire exact de la lecture du recueil entier par Europa Galante parue chez Virgin il y a deux ans. Avec Fabio Bondi, on avance irrésistiblement dans la partition, dans une sorte de fièvre, par des tempi très mobiles et des attaques musclées, presque électriques.

On retrouve aujourd'hui un nerf comparable dans la vivacité du clavecin, et certaines accentuations, mais sans chaos ; on pourra parler d'une célébration opératique très polie chez Antonini et d'un rite païen quasiment dionysiaque chez Bondi, deux points de vue absolument défendables et dans chacun des cas merveilleusement défendus. Pour conclure, je dirais donc que l'on gagnerait à posséder les deux versions chez soi, afin d'y puiser alternativement un renouvellement perpétuel à son écoute.

AB