Chroniques

par laurent bergnach

archives Christoph Eschenbach
Berg – Messiaen – Schönberg – Webern

1 coffret 3 CD Membran (2014)
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Christoph Eschenbach joue Berg – Messiaen – Schönberg – Webern

En avril 1972, nourri d’une pratique instrumentale fertile (violon, alto, orgue, etc.), Christoph Eschenbach (né en 1940) réalise un rêve en faisant ses débuts officiels de chef à Hambourg, avec la Troisième Symphonie de Bruckner. Cette expérience l’amène à diriger dans bien d’autres villes à travers le monde – dont Darmstadt, qui le voit descendre en fosse pour sa première expérience d’opéra (La traviata), en 1978 – et à accepter la direction musicale de divers festivals et formations, de l’Ancien Monde (Zürich, Paris) et du Nouveau (Houston, Philadelphie).

Si le musicien étudie la direction avec Wilhelm Brückner-Rüggeberg (1906-1985) à la veille des années soixante, ses premières amours concernent le piano, auquel l’initie Wallydore Eschenbach, sa mère adoptive. Il poursuit sa formation avec Eliza Hansen (Hambourg) et remporte, à onze ans, le premier prix au Concours Steinway de jeunes pianistes en Allemagne. À partir de 1955, Hans-Otto Schmidt-Neuhaus devient son nouveau professeur (Cologne), avant le retour vers Hansen. Lauréat d’autres concours encore, le natif de Wrocław commence à enregistrer à partir de 1964.

Le présent coffret regroupe des œuvres gravées entre 1996 et 2000, dans lesquelles Eschenbach tient le clavier plutôt que la baguette, seul ou entouré des Houston Symphony Chamber Players. À l’exception du Quatuor pour la fin du temps (Messiaen), ils défendent la Seconde École de Vienne. Loin de voler la vedette à ses confrères, Arnold Schönberg (1874-1951) y est représenté par Fünf Orchesterstücke Op.16 (1912), typique de la Klangfarbenmelodie, Sechs kleine Klavierstücke Op.19 (1912) et Bläserquintett Op.26 (1924). Pour les pièces les plus anciennes, une couleur romantique, presque mahlérienne, émane d’une lecture claire et précisément définie.

Sur les traces de son professeur, Anton von Webern (1883-1945) délaisse le système tonal – qui structure Zwei Stücke Op.posth. (1899) – pour explorer de nouvelles écritures. Les pages ici réunies témoignent d’un goût pour la forme courte et le duo : Vier Stücke Op.7 (1911), Drei kleine Stücke Op.11 (1924), Konzert Op.24 (1935), Variationen Op.27 (1937) ainsi que Sonate pour violoncelle, écrite en 1914. Comme Zwei Stücke, celle-ci fut publiée à titre posthume, et créée le 3 juin 1970, à Cleveland (USA), par Gregor Piatigorsky (violoncelle) et Viktor Babine (piano). Les nombreux Sehr langsam sont respectés à la lettre.

Tout d’abord circonscrit à la musique vocale, Alban Berg (1885-1935) est transformé par sa rencontre avec Schönberg, en 1904. Les œuvres suivantes signalent cette évolution : Klaviersonate Op.1 (1911), Vier Stücke Op.5 (1919) et Adagio pour violon, clarinette et piano, transcription du mouvement médian du Kammerkonzert (1927), la première œuvre dodécaphonique de l'auteur. Dans la Sonate, le pianiste affiche une tendre expressivité, sans promouvoir l’urgence qui tenta les « percussionnistes » Glenn Gould ou Fazil Say.

Pour conclure, citons les autres musiciens talentueux de ce programme franco-viennois : Scott Holshouser, Thomas Jaber (piano), Uri Pianka, Eric Halen (violon), Wayne Brooks (alto), Desmond Hoebig (violoncelle), Timothy Pitts (contrebasse), Aralee Dorough (flûte), Robert Atherholt (hautbois), David Peck (clarinette), Benjamin Kamins (basson), William Ver Meulen (cor), John De Witt (trompette) et Allen Barnhill (trombone).

LB