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Ces dernières années ont été plutôt florissantes en sorties de DVD ou disques d'œuvres de Britten. Voici donc ici Le Tour d'écrou en version filmée réalisée par Katie Mitchell pour la BBC. L'atmosphère macabre de l'opéra est mise en évidence avec un talent certain : l'action se déroule pendant un hiver gris, froid et brumeux, seulement éclairé par une pâle lueur solaire, dans un vieux manoir lugubre entouré d'un immense parc avec de grands arbres, lieu idéal pour une telle histoire. Bref, l'œuvre lyrique est traitée comme un thriller, avec une atmosphère oppressante et même morbide – puisqu'on découvre des sortes de messes noires.

Par un procédé de flashback, le spectateur entrevoit ce qui s'est passé entre les enfants et les précédents domestiques, Peter Quint et la gouvernante Miss Jessel – notamment entre le petit Miles et le valet. L'on y voit également les circonstances de la mort de Quint et celle de Miss Jessel. D'autres idées de ce genre viennent enrichir le film (enfants fleurissant les tombes, fantômes assistant à l'arrivée de la gouvernante, etc.).

Cette production est servie par une excellente équipe de chanteurs. Avec un léger embonpoint et un regard limpide, Lisa Milne incarne la gouvernante en lutte, jeune femme ordinaire, pleine de bonne volonté plus que perverse. Nous assistons à sa maladresse face à un phénomène qui la dépasse. La voix est pure, le legato parfait. Catrin Win Davies est une Miss Jessel désespérée et pathétique, qui semble errer sans but précis, adaptant sa voix selon les circonstances ; Diana Montague, une Mrs Grose distinguée. Quant à Mark Padmore, il a non seulement le physique du rôle – grand, mince, avec un regard halluciné – mais son jeu s'accorde au Quint manipulateur et meneur décrit par Mrs Grose.

Les enfants, enfin, sont également convaincants : la Flora de Caroline Wise (qui avait enregistré le rôle avec Daniel Harding), à la fois innocente et sensuelle, et le Miles de Nicholas Kirby Johnson, victime aimantée qui tente maladroitement de s'arracher à son bourreau, au chant moins apprécié que celui de sa jeune partenaire. Grand habitué de la musique anglaise du XXe siècle, Richard Hickox dirige efficacement le City London Symphonia.

SC