Chroniques

par laurent bergnach

Buxton Orr
mélodies

1 CD Delphian (2017)
DCD 34175
Le ténor Nicky Spence chante les mélodies de Buxton Orr (1924-1997)

C’est pour se consacrer pleinement à la musique que Buxton Orr (1924-1997) abandonne ses études de médecine. De 1952 à 1955, il étudie à Londres avec Benjamin Frankel (1906-1973), moins connu pour ses huit symphonies (1958-1971) que pour sa contribution sonore à différents genres cinématographiques – The surse of the werewolf (La nuit du loup-garou, 1961), The night of the iguana (La nuit de l’iguane, 1964), Battle of the Bulge (La bataille des Ardennes, 1965), etc. Sur les pas de son maître, le natif de Glasgow va lui aussi écrire pour des drames psychologiques – Suddenly last summer (Soudain l’été dernier, 1960) – comme pour des films d’horreur – Corridors of blood (Couloirs de sang, 1962). Et comme lui, il va également enseigner (1965-1990) et diriger (London Jazz Composers’ Orchestra).

D’abord marqué par l’influence de Britten et Frankel, Orr explore son propre langage à travers nombre de domaines : opéra, théâtre musical, musique orchestrale ou chambriste, ensembles de cuivres et de vents, mélodies à l’accompagnement varié. De même que le label Marco Polo jadis, par quelques trios avec piano (8.223842), Delphian offre de redécouvrir ces dernières, interprétées par le ténor Nicky Spence, Écossais formé à la Guildhall School of Music and Drama (Londres) tout comme l’auteur de The wager (1961).

Trois des cinq pièces rassemblées convoquent le piano, joué par l’excellent Iain Burnside. La plus ancienne, Song of a childhood (1962), ramena Spence à ses propres souvenirs lorsqu’il découvrit ce cycle fondé sur six textes savoureux abordant l’enfance (Cruickshank, Landles, Mackie, Smith, Soutar). Pour The ballad of Mr & Mrs Discobbolos (1970), Orr emprunte un texte (très) bavard à Edward Lear (1812-1888), chantre du nonsense, dans lequel une famille provoque sa propre perte à toujours redouter le danger. Ouvrant le programme, les quatre couplets de The painter’s mistress (1974), sur des vers de James Elroy Flecker (1884-1915), mettent en avant la souplesse et la tendre expressivité du chanteur.

Canzona (1963) tient une place à part. Cycle le plus long du compositeur, il fait appel à des auteurs d’autrefois (du XIVe siècle, pour le plus ancien) et à un instrumentarium inhabituel : clarinette (Jordan Black), violon (Tristan Gurney), alto (Gordon Bragg) et violoncelle (Mark Bailey), les trois derniers artistes appartenant au Quatuor Edinburgh. Comptant parmi ses ultimes travaux, Ten types of hospital visitor (1986) met en avant la clarté très britannique du ténor, des couleurs insoupçonnées de contrebasse (Nikita Naumov), ainsi que l’humour du compositeur en phase avec celui du poète cornique Charles Causley (1917-2003).

LB