Recherche
Chroniques
Claude Debussy
pièces pour piano
La musique pour piano de Claude Debussy est un passage discographique obligé pour tout pianiste français à la notoriété affirmée, comme les œuvres des compositeurs romantiques allemands sont des pièces incontournables pour les pianistes allemands. François Chaplin [lire notre critique du CD], Alain Planès, Jean-Pierre Armengaud, François Joël Thiollier sont les récents auteurs de disques Debussy d'un grand intérêt qui viennent rejoindre les références gravées par les illustres aînés : Samson François, Robert Casadesus, etc. Forte personnalité de la scène musicale française, la pianiste Vanessa Wagner peut se targuer d'une belle discographie hautement qualitative, de Brahms à Scriabine en passant par Schumann et Rachmaninov. Cette artiste sincère se devait de se lancer à l'assaut de ce monument de la musique française.
Le programme est centré autour des pièces évocatrices de Debussy : les deux recueils des Images pour piano, des Images oubliées et des Estampes, le tout étant prolongé par quelques courtes pièces – la Valse romantique, L'Isle joyeuse et La plus que lente. L'approche de Vanessa Wagner se situe dans la tradition française, soit le refus d'un certain hédonisme sonore au profit d'une grande concentration sur la construction et la progression. Une grande importance est accordée à l'équilibre polyphonique entre les lignes. Pourtant, ce Debussy plus intellectuel que sensoriel ne nous convainc pas entièrement.
Ainsi les Estampes apparaissent un peu trop lentes et surtout trop centrées sur la construction, dans un toucher somme toute assez dur. Le cas des deux cahiers d'Images est aussi révélateur de la qualité et des limites de cette approche. Les mouvements lents comme Reflets dans l'eau sont abordés dans un tempo qui laisse percevoir la solidité et la rigueur de la construction, mais les intentions sont trop présentes et l'oreille perd vite le fil conducteur. Les parties rapides à l'image de Mouvements sont emportées dans des tempi fort vifs, alors que la pianiste joue sur les contrastes et les ruptures du discours. Tout compte fait, c'est dans les petites pièces que la vision de Vanessa Wagner est la plus prenante.
Les partisans d'un Debussy sensoriel resteront fidèles à Michelangeli (Deutsche Grammophon) ou Arrau (Philips), et ceux qui aiment un Debussy plus réfléchi chériront les galettes enregistrées par Casadesus (Sony) et Pollini (DGG), tout en reconnaissant la probité et l'intérêt de ce disque.
PJT