• pages de chevet

En frappant une de ses touches, on entend un son. Si on lui donne un coup de poing, il répond par une espèce d'accord. En posant l'avant-bras tout entier sur le clavier, on produit un cluster...

Depuis son invention, le piano – à la suite du pianoforte – a marqué l'histoire de la musique et peut-être plus encore. Dieter Hildebrandt nous en livre les étapes importantes dans son livre Le roman du piano. Ses courts chapitres sont autant de portraits de compositeurs, marquants ou tombés de leur piédestal, que l'auteur saisit le plus souvent à une date précise de leur vie et de leur carrière. Ainsi, nous découvrons Scarlatti dans un duel au clavecin ou à l'orgue avec un confrère, Beethoven écrivant une lettre de remerciement en français pour le piano Braodwood qu'on lui offre, la petite Clara – future madame Schumann – jouant devant Goethe, l'échec du premier concerto de Brahms, Schönberg recevant les compliments de Busoni, Horowitz en convalescence auprès de Rachmaninov (lui-même ayant un jour cherché conseil auprès de Tolstoï), Granados entraîné au fond de l'eau par l'or de son dernier cachet... Tant d'événements heureux et malheureux qui nous rappellent que le pianiste, avec sa force et ses faiblesses, son abnégation et ses révoltes, est présent partout de par le monde, des salons de Vienne à ceux du Titanic, des premières salles de cinéma au Stalag VIII de Görlitz.

Tout en replongeant dans trois siècles de destins, nous assistons à des étapes importantes de la technologie pianistique – l'apparition du marteau, de la pédale, du cadre en métal, etc. – mais aussi de l'évolution musicale – le jeu d'études en public grâce à Chopin, les expériences microtonales de Hans Haba, la préparation d'un piano à la manière de John Cage, etc. N'oublions pas non plus la naissance, à côté de l'accordeur et du critique musical, de l'impresario, ce complice « mi-mécène, mi-esclave »!

Cet ouvrage, qui tient notre curiosité en éveil de par sa forme romancée, nous permet d'apprendre ou réapprendre l'essentiel sur ce qu'on pourra ensuite nommer, à juste titre, « le roi des instruments ».

LB