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Chroniques
Franz Liszt – Richard Wagner
pièces pour piano
Une fois n'est pas coutume : c'est vers le répertoire romantique qu'Ambronay Éditions oriente cette nouvelle publication, puisqu'elle est intégralement consacrée à la musique deFranz Liszt. Mais, attention, quel Liszt ? Liszt l'introspectif des derniers temps, Liszt qui regarde voguer sur le canal la dépouille de son confrère, gendre et ami Richard Wagner, Liszt qui transcrit la mort d'Isolde ; également le quarantenaire encore fougueux de la Sonate en si mineur, dont certains aspects amorcent celui que nous venons de décrire.
Une fois n'est pas coutume : c'est vers le piano et non le clavecin, le positif ou le pianoforte que lorgne cette exception du catalogue Ambronay. Et, là encore, quel piano ? Un Steingräber de 1873 sur lequel Liszt en personne aurait donné un concert en 1878 et dont il disposait encore deux mois avant de disparaître, en 1886.
Une fois n'est pas coutume : c'est une approche précise et rigoureuse, scrupuleusement construite sur une véritable connaissance du contexte de chacune des œuvres gravées, des procédés du compositeur et de la nature complexe de l'amitié qui le liait à Wagner, plutôt qu'inspirée par des aléas interprétatifs flirtant parfois avec le caprice, qu'offre ici le pianiste Thomas Hitzlberger – salué d'une Anaclase !
Outre les deux Gondoles funèbres dont le recueillement envahira l'écoute, les R.W.-Venezia et Am Grabe Richard Wagners de 1883, ce disque présente la Sonate achevée en 1853, adjoignant à la version habituelle la conclusion originale que l'on pourra découvrir en fin de parcours, signant la cohérence absolue de l'édifice qui restitue une sonorité entendue par Liszt sur un instrument qu'il a pratiqué (même si celui-ci subit une restauration en 1928) et tout un univers de méditations tourné vers le passé, la perte, la mort. Du reste, l'on s'étonnera que la richesse de couleur de ce piano d'époque souligne paradoxalement toute la modernité de l'écriture lisztienne.
De Wagner, Thomas Hitzlberger donne la Sonate pour l'album de Madame M.W, soit Mathilda Wesendonck dont les poèmes inspireraient quelques années plus tard les plus fameux Wesendonck Lieder dont certains féconderaient Tristan und Isolde ; voilà une rareté qui continue de placer cette galette hors de ce qui paraîtra coutumier ! Plus fréquentée, la transcription lisztienne de l'Isoldens Liebestod trouve ici un lyrisme magistralement conduit sans recourir à des effets pléthoriques.
BB