Chroniques

par laurent bergnach

Franz Schubert
pièces avec flûte et piano – Wandererfantasie D760

1 CD Saphir (1998)
LVC 001038
Franz Schubert | pièces avec flûte et piano – Wandererfantasie D760

Dans ce bel enregistrement mi-studio, mi-live, le label Saphir Production nous offre quelques œuvres de Schubert écrites ou adaptées pour flûte et piano. On y entend tout d'abord une transcription du célèbre Ständchen, Lied écrit l'année de sa mort, en 1828, sur un poème de Ludwig Rellstab. L'œuvre du compositeur, on le sait, n'a jamais laissé indifférent ses héritiers – voir les transcriptions de Liszt [lire notre critique du CD], le Rendering de Berio, la Kontra-Sonate de Pauset, etc. Ici, l'arrangement est dû soit au violoniste viennois Leopold Jansa, soit à Theobald Boehm, musicien de cour bavarois mais surtout industriel qui a apporté des innovations importantes dans l'évolution de la flûte moderne ; en changeant la physiologie de l'instrument (place des trous, dimension, poids, etc.), il a permis d'obtenir une sonorité plus pleine, plus ronde.

Composées à l'origine pour le violon en mars et avril 1816, les trois Sonatines furent publiées à titre posthume, en 1836. Parce que ce sont des œuvres de jeunesse, on les a parfois approchées avec condescendance. Avec une certaine élégance, l'écriture économe parvient cependant à évoquer la douceur, la tristesse et la moquerie. La première, en ré majeur D384, nous laisse entendre ici la flûte nuancée de Patrick Gallois, proche de la voix humaine.

Avec la Wandererfantasie D760 Op.15 (Fantaisie d'un voyageur), on retrouve un des thèmes schubertiens par excellence. Œuvre de commande datée de 1822, la virtuosité de ses quatre mouvements enchaînés (Allegro con fuoco ma non troppo –Adagio – Presto – Allegro) n'est pas sans évoquer Beethoven, mais aussi le futur Liszt. Le pianiste Jörg Demus laisse éclater un jeu brillant qui tranche avec la retenue dont il fait preuve dans les duos.

Le cycle Die schöne Müllerin est composé en 1823. L'année suivante, suite à la commande du flûtiste Ferdinand Bogner, il en extrait le thème de la mélodie Trockne Blumen (Fleurs séchées). De ce Lied, plus proche du chant funèbre que de l'exaltation passionnée, naît Introduction et Variations, la seule œuvre écrite directement pour piano et flûte. Tour à tour, les instruments seront mis en valeur au sein des sept variations de la partition, créant un tourbillon de sombre inquiétude qui laisse l'auditeur sans repos.

Daté de la même année (ou de 1824), Six moments musicaux D780 est un recueil de pièces très variées. Jörg Demus a adapté la première – surnommée, en Autriche, Le cri du coucou – en y ajoutant une flûte, un ténor et une soprano. Vaillant, délicat, nuancé malgré quelques accrocs, Zeger Vandersteene – qui a d'ailleurs enregistré Winterreise pour le label belge René Gailly – défend ce morceau avec beaucoup d'expressivité, en faisant un des moments les plus originaux de ce disque.

LB