Recherche
Chroniques
Gabriel Pierné
Sophie Arnould – Ballet de cour
À l'époque où sa petite taille et ses traits juvéniles le font surnommer « le gosse » par ses camarades de la Villa Médicis, Gabriel Pierné (1863-1937) ne manque pas de rapporter à ses parents quelques soirées lyriques qui le fascinent ou l'horripilent. En pleine redécouverte de l'art de Wagner qu'il déteste au piano, le jeune créateur garde pourtant les pieds sur terre et écrit : « […] je ne vais pas me lancer dans l'opéra maintenant ; j'ai trop de choses à faire. Je ne dis pas non, mais à plus tard » (30 avril 1883). Effectivement, c'est bien après les mélodies et pièces pour piano écrites à Rome que viendront fantaisie lyrique (Bouton d'or, 1892), mimodrame fantastique (Le Docteur blanc, 1893), opéra-comique (La Coupe enchantée, 1895) ou encore légende musicale (La Croisade des enfants, 1905).
C'est chez le librettiste de cette dernière que Pierné rencontre Gabriel Nigond, lequel fait représenter sa pièce Sophie d'Arnould, avec succès, en 1921. À l'exception de quelques répliques, la totalité de cette comédie en un acte est mise en musique, en grande partie durant l'été 1924. On y découvre un épisode imaginaire de la vie de Magdeleine Arnoult, dite Sophie Arnould (1740-1802), soprano célèbre pour ses bons mots, qui créa notamment le rôle-titre d'Iphigénie en Aulide (Gluck). En cette fin d'après-midi au prieuré de Luzarches, Sophie reçoit le Comte de Lauragais qui l'enleva plus jeune. Sous l'œil de la servante, les deux anciens amants se remémorent disputes et jalousies d'autrefois. Cette « conversation en musique » fait s'enchaîner de courtes séquences de caractère contrasté, et se distinguer les soli instrumentaux.
Dans cette œuvre crée le 21 février 1927 à l'Opéra Comique, on retrouve aujourd'hui une distribution équilibrée, au chant souple et à l'expressivité dosée : Sophie Marin-Degor (Sophie), Doris Lamprecht (Babet) et Jean-Sébastien Bou (Dorval). Quant à l'Orchestre Philharmonique du Luxembourg, il livre avec tendresse toutes les couleurs de la partition sous la battue de Nicolas Chalvin. Cette première mondiale est donc une bien bonne surprise, dans le fond comme dans la forme. Avec ce même regard sur une musique ancestrale, le programme se poursuit avec Ballet de cour, orchestration d'une suite pour piano de 1901, composée de six airs à danser dans le style ancien.
LB