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Chroniques
Georg Friedrich Händel – Nicola Francesco Haym
sonates en trio
Dans le cadre de sa collection Jeunes Ensembles, les Éditions Ambronay proposent une intéressante confrontation entre les sonates en trio d'Händel et celles de son librettiste Haym, lui aussi compositeur. Haym écrivit ces œuvres en 1701, tandis que celles de Händel furent conçues entre 1715 et 1733. L’Aura Rilucente, ensemble en résidence du Centre culturel de rencontre d’Ambronay, fondé en 2011, a sélectionné un florilège alternant les œuvres des deux musiciens.
Né à Rome de parents allemands, Nicola Francesco Haym (1648-1729) est violoncelliste, compositeur et librettiste renommé. Il arrive à Londres en 1701, pendant que Georg Friedrich Händel (1685-1759) étude l’opéra italien à Rome. Ce n’est qu’en 1713 que nos deux compères collaborent ensemble pour Teseo donné au Queen’s Theatre [lire nos chroniques du 20 mars 2007 et du 9 juin 2003], puis pour Giulio Cesare in Egitto, Rodelinda, Tamerlano et Ottone, entre autres.
Les instrumentistes de L’Aura Rilucente se font un méritant devoir de ressusciter des œuvres oubliées. Ainsi découvrent-ils en 2012, à la Koninklijke Bibliotheek de La Haye (Bibliothèque royale), les sonates en trio qui figurent sur ce disque, quasi inédites. Le XVIIIe siècle voit l’essor de l’opéra italien dans l’Europe du Nord. Le public bourgeois en raffole de plus en plus. Le format des salles évolue vers des théâtres à l’italienne, plus vastes, où il est de bon ton de se montrer. Faute de ne pouvoir assister à ces représentations très convoitées, les transcriptions d’opéra sont un palliatif pour les amateurs lyriques, auquel se livrent les musiciens et les compositeurs eux-mêmes.
Pour restituer à ce programme original et ambitieux tout l’esprit de l’époque, l’association d’airs d’opéra d’Händel transcrits sous forme de sonates en trio sembla donc indispensable au jeune ensemble. Ce dernier a décidé, par ailleurs, d’étoffer les deux violons et le violoncelle, formant initialement le trio, par une harpe, un orgue ou un clavecin, selon l’atmosphère des pièces interprétées.
Autant le dire franchement : le résultat est, hélas, assez décevant.
L’interprétation de L’Aura Rilucente qui « tente de produire un son vibrant, plein d’énergie et de pathos… mais aussi à détendre l’atmosphère et créer des moments de sérénité pure » ne tient pas ses promesses et ne convainc pas. Bien au contraire, l’ennui règne vite à l’écoute des compositions d’Haym, fades, sans éclat et soporifiques. On en cherche en vain le charme et le génie.
Quant à elles, les pages d’Händel sont riches et pleines d’attrait. Il faut dire que l’ensemble des sonates du Caro Sassone sont inspirées d’airs fameux de Rinaldo, Admeto, Tolomeo, Ottone et Amadigi. Du coup, le contraste est d’autant plus flagrant et lèse fatalement Haym. L’ornementation des instruments invités à compléter les sonates apporte une touche fruitée et plaisante aux pièces de l’Allemand, alors que celles de l’Italien en sont souvent dépourvues.
Enfin, l’auditeur habitué à plus de morbidezza et de legato, dans l’interprétation de la musique de chambre baroque sur instruments d’époque, sera surpris par le choix de cette formation. L’exécution reste scolaire et sèche, sans « énergie, pathos ou sérénité pure ». Cette vision ne s’élève en aucune manière. Aigrelettes, les cordes finissent par irriter l’auditeur bienveillant qui se voit projeter quarante ans en arrière, au temps des balbutiements des pionniers du renouveau baroque. La harpe finit par constituer un baume pour des oreilles lassées et découragées – une contreperformance de ce sympathique jeune ensemble dont c’est le premier enregistrement et à qui on ne peut que souhaiter de mûrir sa conception et son interprétation pour ses découvertes futures.
MS