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Chroniques
Giacomo Puccini
Madama Butterfly | Madame Butterfly
Des retrouvailles avec Madama Butterfly ne se refusent pas, d'autant qu'on espère toujours de « l'opéra le plus sincère et le plus expressif » conçu par Puccini – selon ses propres mots – une version équilibrée, quelque part entre le minimalisme halluciné de Bob Wilson [lire notre critique du DVD] et le foutoir entomologique de Stefano Moni [lire notre critique du DVD].
Malheureusement, une fois encore, le mélomane délicat est accueilli avec un brouet de cantine : captée aux Arènes de Vérone le 10 juillet 2004, dans un décor kitsch qui mêle esthétiques chinoise et japonaise, la mise en scène de Franco Zeffirelli se révèle poussiéreuse et maniérée. Les suivantes minaudent, les costumes sont laids et le ridicule culmine au troisième acte avec ce bonheur passé en flash-back, l'apparition d’une Kate Pinkerton comptant quatre fois l'âge de Cio Cio San – et les Parques de la toute fin.
Fermerait-on les yeux que la prestation de Fioreza Cedolins, dans le rôle-titre, donnerait aussi l'envie de boucher ses oreilles. La voix, qui semble construite à vau-l'eau, est dure, métallique, sans place précise et recouverte d'un voile ; les cordes ne vibrent pas dans l'aigu, faisant jaillir des contre-uts blancs à vous hérisser le poil.
Alors que Francesca Franci est une Suzuki intérieure, sa maîtresse peine à exprimer : avec des airs de duègne, on la croirait à l'origine de son mariage arrangé, et se révèle moins tendre avec l'enfant que ne l'est Sharpless – Juan Pons à la belle présence. Son absence de grâce tranche d'autant avec la finesse et la nuance de Carlo Bosi (Goro), la puissance maîtrisée de Carlo Striuli et le charme spinto de Marcello Giordani (Pinkerton).
En fosse, la prestation catastrophique de Daniel Oren et de l'orchestre (percussions crues, cordes sans âge) n'arrange rien. Manquant de respiration et de profondeur, le chef fait fi de la sensualité et du raffinement de l'ouvrage. Au risque de mettre les chanteurs en péril, il décompose les passages les plus lents et transforme les plus énergiques en musique militaire creuse et sans couleur – nous avions déjà signalé de semblables problèmes dans Tosca [lire notre critique du DVD]. Notre Japonaise ne méritait pas ce coup de poignard supplémentaire...
SM