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Chroniques
Gioachino Rossini
Il Turco in Italia | Le Turc en Italie
Créé le 14 août 1814, à la Scala de Milan, Il Turco in Italia souffrit des similitudes que l'ouvrage présentait avec L'Italiana in Algeri, vu à Venise un an plus tôt. En effet, turquerie, badinage et mascarade sont de nouveau au programme, laissant croire au public que Gioachino Rossini (1792-1868) s'était contenté d'une inversion de sujet. On mit longtemps à s'apercevoir de l'originalité, voire de la modernité d'une œuvre bâtie sur le livret plein d'ironie de Felice Romani (1788-1865). La seule présence du personnage du poète, qui construit son drame au fil de l'opéra, apporte une distance avec les canons et les recettes du dramma buffo.
À la recherche d'un sujet de comédie, Prosdocimo rencontre, au sein d'une troupe de bohémiens, Zaida qui fut jadis esclave amoureuse au sérail de Selim Damelec. Persuadé d'une infidélité par des rivales jalouses, celui-ci la condamna à mort au lieu de l'épouser. Sauvée de justesse, elle aime pourtant toujours ce prince turc qui, justement, débarque en terre italienne afin d'étudier les mœurs européennes. Le poète décide de les réconcilier, mais il aura fort à faire puisque le Turc est déjà en train de s'amouracher de la volage Donna Fiorilla, au désespoir de son mari Geronio et de son amant favori, Don Narciso. Après quelques mises à l'épreuve et quiproquos, Zaida goûtera au bonheur tant attendu, tandis que Geronio pardonne à l'épouse qui s'apprêtait à prendre la mer.
Production de l'Opéra de Zurich (avril 2002), ces deux actes sont un vrai bonheur ! Tout y est soigné, des décors aux costumes (Tulio Pericoli), mais aussi la direction de Franz Welser-Möst et la mise en scène de Cesare Lievi. Le traitement du poète à la fois témoin et créateur, la concupiscence étalée sans vulgarité, l'humour bon enfant, la direction d'acteurs sont exemplaires.
Si on pourra évoquer quelques problèmes vocaux de ci, de là – manque de tonus pour Ruggero Raimondi (Selim), quelques ratés dans les passages à l'aigu pour Reinaldo Macias (Narciso), engorgement pour la basse Paolo Rumetz (Geronio), etc. –, les solistes ne manquent ni d'énergie ni de puissance. Une fois de plus, Cecilia Bartoli (Fiorilla) est techniquement étonnante, et la malice de son personnage doit beaucoup à sa propre nature.
SM