Chroniques

par laurent bergnach

Giuseppe Verdi
Attila

1 DVD Warner Music Vision (2005) zones 2, 3, 4, 5
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Giuseppe Verdi | Attila

Quelques années avant le Grand Œuvre de Wagner à Bayreuth, le nom de Wodan retentit sur une scène : en 1844, Verdi découvre une pièce de Zacharia Werner, Attila, roi des Huns, et va bientôt mettre en musique cette histoire pétrie de folklore païen. L’Italien vise à la simplicité ; il supprime les personnages annexes pour se concentrer sur les principaux dont il va changer le sort. À côté de ceux qui échappent à la mort, on découvre un Attila moins sanguinaire que prévu, avec des gestes nobles (le don de son épée à une vierge courageuse), qui nous touche par sa perméabilité à la superstition et dont la survie, suite à un attentat manqué à la coupe empoisonnée, nous réjouit.

Même si les idéaux patriotiques sont une fois de plus exaltés dans l'ouvrage, Verdi s'avère déçu par l'élan national du moment – ce qui explique peut-être la surprenante mélancolie de l'Ouverture. Lentement, il se tourne vers la peinture des émotions individuelles. À cet égard, Attila est symptomatique de cette période de doute et de transition, d'innovation et de recettes éprouvées, de même qu'est révélateur le recours à deux librettistes complémentaires : l'héroïque Solera et l'intimiste Piave. Créé le 17 mars 1846 à La Fenice de Venise, l'ouvrage rencontre un beau succès, sans pour autant devenir un incontournable du répertoire.

Captée en 1985 par la Radiotelevisione Italiana, cette production des Arènes de Vérone est plutôt convaincante. Si la direction d'acteurs de Giuliano Montaldo échappe difficilement à une mise en scène frontale, on peut trouver quelques moments plus dynamiques, comme la construction de l'autel au bord de la lagune vénitienne, ou la danse du soldat Hun durant la trêve. Luciano Ricceri compose une Italie dévastée grâce à des décors impressionnants, entre le minéral (des gradins, des colonnades) et le végétal, tandis que Nana Cecchi propose des costumes variés, correspondants aux différentes ethnies en lutte dans cette marche sur Rome de l'envahisseur.

Dans le cadre de ce festival en plein air, les voix ont été choisies pour passer la rampe. La basse Evgueni Nesterenko a le charisme et la puissance vocale nécessaires pour incarner un rôle-titre des plus attachants. Veriano Luchetti, malgré une tendance à nasaliser, campe un Foresto nuancé, à la vaillance contenue. Silvano Carroli, baryton qui frôle souvent l'engorgement, est un Ezio honnête. Avec une aisance et une ampleur sensationnelles, non dépourvue de nuances, Maria Chiara offre une Odabella qui remporte une ovation dès la fin de son premier air. En fosse, Nello Santi conduit l'orchestre avec nuances et élégance.

LB