Chroniques

par laurent bergnach

Hilda Paredes
pièces avec cordes

1 CD æon (2014)
AECD 1439
Le Quatuor Arditti joue la musique d'Hilda Peredes (née en 1957)

Née à Tehuacán (Mexique) en 1957, c’est à Londres qu’Hilda Paredes passe ces trente-cinq dernières années, étudiant à la Guildhall School of Music et, avec Peter Maxwell Davies et Richard Rodney Bennett, à la Dartington Summer School. Elle garde néanmoins un pied aux Amériques, puisqu’elle enseigne dans quelques universités du Sud (Mexico) comme du Nord (San Diego, Buffalo). Régulièrement, que ce soit en compagnie d’un piano – Anachronic songs (1979), Globo, luciérnagas, faro (1992), etc. – ou pour la scène – Agamemnon takes a bath (1990), The seventh seed (1993), etc. –, elle montre son goût pour la voix en général.

Sur cinq pièces du programme porté par le Quatuor Arditti, trois font entendre le contre-ténor Jake Arditti. La plus ancienne, Papalote (écrite en 2000, créée en 2009), fait suite à un souhait de l’artiste, encore enfant, de pouvoir former un duo avec son père Irvine au violon. Empruntée à un poème de Rocio González, l’image du cerf-volant relié à des filets de pêche évoque une griserie maîtrisée, à laquelle la musique sert de paysage. La pièce donnera lieu à une version éponyme avec quatuor (2007) qui offre un écrin plus moelleux aux mots du poète.

Autre poète mexicain, Pedro Serrano inspire à Hilda Paredes ses trois Canciones lunáticas (2011). De même que l’astre nocturne se fait par moment métaphore de l’âme, la musique peut mettre à jour différentes possibilités sémantiques, même contradictoires. Pour ce grand écart régulier entre murmures et injonctions, le jeune chanteur possède une souplesse et une vigueur expressives qui remettent à l’esprit le plaisir pris lors du concert parisien où fut également présenté Altazor, cette fois avec baryton [lire notre critique du 18 novembre 2011].

Entre les créations de U Yu T'an (1998) et Bitácora capilar (2014), Cuerdas del destino (2008) voit le jour à Parme, troisième des quatuors de la compositrice pour la formation maintenant quarantenaire de son époux. Elle explique : tandis que les instruments traversent des phrases très variées en restant unis, « le concept de conséquence est le principe à partir duquel se développent tous les matériaux et qui crée la direction, la dramaturgie et la structure de la pièce » [lire notre chronique du 24 janvier 2014].

Enfin, signalons In memoriam Thomas Kakuska (2006), solo de violon dédié à celui qui fut l’altiste du Quatuor Alban Berg, de 1981 jusqu’à son décès en 2005. Afin de rendre l’humeur joyeuse du musicien, Hilda Paredes a opté pour des motifs courts et contrastants, tandis que les harmoniques expriment, quant à elles, une âme profondément mélancolique. D’une dizaine de minutes, cette page ne prend pas le temps de se reposer, comme heurtée par l’urgence de l’adieu.

LB