Chroniques

par laurent bergnach

Jean-Noël von der Weid
La musique du XXe siècle

Hachette Littératures (2005) 720 pages
ISBN 2-012-235948-5
La musique du XXe siècle, par Jean-Noël von der Weid

La musique du XXe siècle a connu des scandales et des rejets qui ont fait date. Sans être le premier, Anton Webern en faisait le constat : le grand public est « perdu lorsqu'il ne peut imaginer une verte prairie, un ciel bleu ou quelque chose de ce genre ». Pour Jean-Noël von der Weid, c'est la nouveauté d'une œuvre qui hérisse l'auditeur, lequel sera rassuré par l'émergence des néoromantiques, néotonaux et autres postmodernes, tel un enfant ravit de son éternel steak-frites. Et pourtant, comme la peinture et la littérature, cet art est bien obligé d'avancer, ne serait-ce que sous l’influence de nouvelles technologies (l'informatique) qui permettent de réaliser aujourd'hui ce à quoi on rêvait hier.

La première partie de ce livre commence avec les grands créateurs d'avant 1945. Bien sûr, le nouveau siècle n'apparaît pas en 1900, si bien que le premier phare évoqué sera Debussy, né en 1862 et pourtant plus porteur d'avenir que ses contemporains Mahler, Strauss, ou Ravel – qui semblent plutôt de riches héritiers. Viennent ensuite les chapitres sur la seconde École de Vienne, Igor Strawinsky – lequel tenait à son « w » –, Béla Bartók, et Edgar Varèse. Durant des décennies, ces Européens ont nourrit les États-Unis avant qu'apparaissent des noms comme Cowell, Copland ou Cage. L'auteur fait un tour d'horizon du continent américain, du Canada à l'Amérique du Sud (Revueltas, Villa-Lobos, Ginastera, etc.), avant de revenir sur le Vieux Continent, car à la suite ou à la traîne des génies évoqués ci-dessus existent le Groupe des Six, les compositeurs qui se retrouveront un jour à l'Est de Berlin ou encore les Britanniques en rupture avec le romantisme allemand.

Après 1945, difficile d'être nationaliste quand Darmstadt réunit entre autres Boulez, Stockhausen, Berio, Nono et Maderna. Si un chapitre est consacré aux deux premiers, il faut bien séparer la musique concrète de l'aléatoire, et rendre Scelsi au « mouvement de l'immobile », Grisey au « craquement des icebergs » et Lachenmann aux « vacarmes de l'infime ».

S'adressant au spécialiste comme au profane, le présent ouvrage est une véritable encyclopédie de la création qui propose le décryptage de courants esthétiques, le parcours de créateurs, l'analyse d'œuvres marquantes, une discographie sélective, une bibliographie multilingue et un index de plus de 6000 entrées. Seule réserve : l'insertion d'encadrés thématiques en cours de chapitre – le prix de Rome, le dodécaphonisme, l'Upic de Xenakis, etc. –, le plus souvent essentiels et pertinents, mais dont on ne sait jamais s'il faut vraiment les lire, ni à quel moment, pour comprendre la suite. Le choix est plus facile quand la mise en exergue concerne des biographies.

LB