Chroniques

par laurent bergnach

Johann Sebastian Bach
motets

1 CD Alpha (2015)
199
Fabio Bonizzoni et la Capella Cracoviensis dans sept motets de Bach

Histoire de rafraîchir les connaissances, ouvrons le Guide des genres de la musique occidentale (Fayard / Henry Lemoine, 2010), afin de définir ce qu’est précisément un motet. D’origine littéraire – motellus désigne, au XIIe siècle, les stances ou les strophes d’une poésie profane –, c’est une pièce vocale polyphonique, essentiellement religieuse, qui comporte ou non une partie jouée par un effectif instrumental varié. Il connaît son âge d’or entre 1220 et 1750, offrant de fait plusieurs visages historiques (gothique, latin, concertant, néo-palestrinien).

À l’époque baroque, le motet n’occupe plus la place centrale, mais continue d’irriguer certains genres émergeants (cantate, oratorio). Dans l’Allemagne luthérienne, alors qu’il était autrefois vivace sous différents types (motet-Lied, motet-choral, Spruchmotette), il est désormais réservé à des cérémonies funèbres, funérailles ou services commémoratifs – à l’instar de Der Geist hilft unser Schwachheit auf BWV 226 (1729), exécuté lors des obsèques de Johann Heinrich Ernesti, recteur de la Thomasschule de Leipzig ; de Jesu, meine Freude BWV 227 (1723) et Fürchte dich nich BWV 228 (1726), chantés en mémoire des veuves Kees et Winckler. « Un même et constant motif spirituel sous-tend les motets, écrit Gilles Cantagrel dans la notice de ce disque, la présence du Christ aux côtés du croyant, au moment où il échappe par sa mort aux vicissitudes de la vie terrestre, le Christ qui le réconforte et lui indique le chemin de son éternité bienheureuse. »

Outre les trois pièces évoquées, Johann Sebastian Bach (1685-1750) signait encore quelques pages au cours des ans, le plus souvent à deux chœurs, parmi lesquelles Singet dem Herrn ein neues Lied BWV 225, Komm, Jesu, komm BWV 229, Ich lasse dich nicht BWV Anh.159 et Lobet den Herrn BWV 230, dont la date de conception nous échappe peu ou prou. Ces derniers complètent le nouvel enregistrement de la Capella Cracoviensis et Fabio Bonizzoni chez Alpha, au sortir de leur récente incursion (déjà funèbre !) chez Charpentier et Lully, saluée par une Anaclase! [lire notre critique du CD].

Une chose essentielle ressort de cette écoute : le refus d’appuyer l’architecture. Ici, rien de heurté, de marcato ; au pire relève-t-on un segment plus impératif, une envolée presque tragique sur fond de discrète basse continue (violoncelle, contrebasse, orgue). Souplesse et fluidité dominent donc, qui éclairent des climats de ferveur confiante, de recueillement sans gravité, avec un rien d’élégance italienne, parfois. Cela n’empêche pas la formation vocale, rompue à la musique ancienne, de se montrer extrêmement précise et définie. Dommage que des soprani souvent crues perturbent l’onctuosité générale.

LB