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Chroniques
Judith Weir
A night at the chinese opera | Une nuit à l’opéra chinois
Commande de la BBC pour l'Opéra de Kent, A night at the Chinese Opera fut créé lors du Festival de Cheltenham, le 8 juillet 1987. Son auteur en est l'Écossaise Judith Weir (née en 1954) qui a étudié avec John Tavener notamment, Robin Halloway ou encore Gunther Schuller. Depuis plusieurs années, elle enseigne à son tour : à l'Université de Glasgow, au Trinity College de Cambridge, à la Royal Scottish Academy of Music and Drama, etc. En 1994, Judith Weir a reçu le Critics' Circle Music Section Award pour la meilleure contribution à la musique de Grande-Bretagne ; elle est actuellement directrice associée du groupe de théâtre expérimental Second Stride et directrice artistique du Festival de Spitalfields. Par la courte durée de ses œuvres scéniques – King Harald's saga (1979), The Vanishing Bridegroom (1990), Blond Eckbert (1994), etc. –, on a souvent évoqué Britten à son propos.
A night at the Chinese Opera représente le premier opéra véritable de la compositrice, dont le livret s'inspire de L'Orphelin de la famille Chao, une célèbre pièce du XIIIe siècle de Chi Chun-Hsiang (Ji Jun Xiang), déjà adaptée par Voltaire et Métastase. L'histoire est celle du petit Chao Lin, recueilli après la prise de sa ville par les troupes de Khubilai Khan et l'exil de son père, le cartographe Chao Sun. Devenu jeune homme, alors qu'il travaille de bonne foi pour l'envahisseur, Chao Lin va assister à une représentation théâtrale donnée en secret, qui – bien qu'elle soit interrompue par un tremblement de terre – va lui ouvrir les yeux sur sa propre histoire. Parti dans la montagne sur les traces de son père biologique, il apprend sa mort survenue dans le froid et la faim. De retour en ville pour tuer le Gouverneur militaire, le jeune homme est emprisonné et condamné à mort. Pendant son exécution, les comédiens finissent de donner leur pièce, dont le dénouement assure à l'orphelin une juste revanche.
C'est parce qu'elle se dit « également fascinée par l'extrême réalisme de la pièce et par la réalité historique de la période qu'elle dépeint » que la musicienne a choisi d'explorer leur relation à travers le théâtre dans le théâtre. Au cœur de la partition, l'Acte II rompt avec une musique soucieuse de précision, de brillance et de clarté au profit d'un fin pastiche de musique traditionnelle – percussions, cordes et flûtes –, loin de toute chinoiserie. Pour y sublimer l'humour satirique d'un théâtre de tréteaux, les chants clairs laissent place aux voix caricaturales, nasillardes ou vieillissantes, adaptées aux fantoches présentés sur scène. Outre un air parodique d'opéra italien mettant en scène Marco Polo, les occasions ne manquent pas de s'amuser avec une salle qui, lors de l'enregistrement du 26 février 1999, ne perdait rien du burlesque des suicides successifs. La direction musicale est assurée par Andrew Parrott à la tête du Scottish Chamber Orchestra.
LB